Le 13 janvier 2022, lors du 50ème anniversaire du congrès de la conférence des présidents d’universités, Emmanuel Macron a prononcé un discours de 53 minutes en guise de clôture de l’événement.
À noter que c’est la deuxième fois qu’Emmanuel Macron s’adresse directement aux responsables de l’enseignement supérieur, la première fois remonte au… 14 avril 2017, là aussi en pleine campagne présidentielle.
Après une longue première partie de discours pour faire l’éloge de son action depuis 5 ans sur l’enseignement supérieur et la recherche, le chef de l’Etat a fait une présentation de son programme de campagne pour la présidentielle 2022 qui ne reflète pas la réalité des jeunes dans nos universités et sur le terrain.
Il annonce que 50% des étudiants ne se présentent pas aux examens…
Ce chiffre jamais évoqué jusqu’à ce jour me paraît extravagant (https://www.liberation.fr/…/est-il-vrai-que-50-des…/).
Tient-il compte des nombreuses réorientations ? Par ailleurs, si on a tant d’échec et de jeunes qui n’accèdent pas aux examens c’est parce que beaucoup s’engagent dans des filières par défaut d’information, d’une orientation choisie et non subie.
L’enseignement supérieur est aussi trop éloigné du lycée actuellement comme nous l’avions souligné dans notre rapport sur l’évaluation de l’accès à l’enseignement supérieur et Parcoursup en juillet 2020 avec Nathalie Sarles ici : https://www.assemblee-nationale.fr/…/l15b3232_rapport…
Sur la précarité des étudiants, Emmanuel Macron affirme : « Nous avons revalorisé les bourses sur critères sociaux pendant trois années consécutives pour préserver le pouvoir d’achat des boursiers. (…) et pourtant nous n’avons jamais vu autant de précarité étudiante ».
La précarité étudiante a toujours été très présente sur les bancs de l’université, la crise sanitaire n’a fait que mettre en exergue une situation bien connu de tous, avec un taux de pauvreté de l’ordre de 25%, le double du reste de la population.
38% des étudiants sont boursiers, mais ils sont aussi 46% à avoir un job étudiant en parallèle de leur cursus pour joindre les deux bouts en fin de mois.
Certains étudiants ont perdu leurs petits boulots pendant la crise sanitaire, les prix des logements n’ont fait qu’augmenter et les aides au logement (APL) ont connu des baisses historiques ces dernières années.
Sans compter l’augmentation du coût de la rentrée chaque année depuis 2017 et sans parler des longues files d’étudiants pendant la crise sanitaire pour récupérer des repas par des associations et les réponses tardives de la part de l’État.
Sur la réalité de ses difficultés, la dégradation de la santé physique et psychique des étudiants pendant les deux ans de la pandémie Covid que nous avons précisément documenté (https://www.assemblee-nationale.fr/…/l15b3703_rapport…), le chef de l’Etat est moins prolixe, à l’image de sa ministre de l’enseignement supérieur Frédérique Vidal aux abonnés absents tout au long de la crise sanitaire.
Ne nous voilons pas la face, l’université est actuellement dans une situation financièrement difficile où elle doit répondre à un afflux démographique important d’étudiants, un sous financement de l’État et le besoin de développer son attractivité pour rayonner à l’échelle nationale, européenne et internationale.
Enfin, autre extrait, le plus grave : « Nous voyons donc bien qu’au-delà de la question des moyens, nous avons une question structurelle et on ne pourra pas rester durablement dans un système où l’enseignement supérieur n’a aucun prix pour la quasi-totalité des étudiants, où un tiers des étudiants sont boursiers et où, pourtant, nous avons tant de précarité étudiante et une difficulté à financer un modèle qui est beaucoup plus financé sur l’argent public que partout dans le monde pour répondre à la compétition internationale. »
Le souhait est donc de faire payer les étudiants pour rentrer dans l’enseignement supérieur. Clairement, nous aurons les classes défavorisés dans les formations courtes et profesionnalisantes accompagné d’une grande partie de la classe moyenne, de l’autre côté les classes supérieures dans les universités.
Nous ne voulons pas d’une sélection sociale déguisée, par l’argent dans l’enseignement supérieur !
En regardant un peu plus près les acteurs autour du Président de la République, nous remarquons une forte influence de l’Institut Montaigne sur les décisions de l’Élysée en matière d’enseignement supérieur et de recherche et nous connaissons leur souhait d’une hausse des frais d’inscriptions des étudiants pour posséder une nouvelle source de financement importante.
Je souhaite rappeler ici que l’enseignement supérieur gratuit est un droit pour notre jeunesse. Les Conseil Constitutionnel l’a rappelé dans sa décision du 11 octobre 2019 : « L’exigence constitutionnelle de gratuité s’applique à l’enseignement supérieur gratuite. Cette exigence ne fait pas obstacle à ce que des droits d’inscription modiques soient perçus en tenant compte des capacités financières des étudiants ».
C’est à l’État de rendre effectif ce droit sans que le coût financier ne pénalise ni ne décourage les étudiants, en particulier d’origine modeste.
Pour rappel j’ai défendu depuis de nombreuses années la mise en place d’un revenu de base pour les étudiants avec une dotation universelle pour permettre aux jeunes de réaliser leurs études dans de bonnes conditions sans contraintes financières.
En parallèle, il faut doter les universités des moyens nécessaires pour que le taux d’encadrement, les infrastructures et les conditions d’études soient décentes et mettre fin aux inégalités de dotation qui pénalise par exemple l’Université Jean Monnet à Saint-Etienne. De ce fait, il faut revaloriser le budget actuel de l’Etat et investir dans l’enseignement supérieur et la recherche.
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