Considérant l’accord UNEDIC intervenu le 22 mars dernier inacceptable concernant le régime des intermittents du spectacle, j’avais écrit au ministre du Travail, de l’Emploi et du Dialogue social, François Rebsamen pour lui demander de ne pas l’agréer en l’état. Aussi je me félicite que le Gouvernement, par la voix du Premier Ministre Manuel Valls, ait fait hier des propositions pour sortir du conflit avec les intermittents du spectacle, en présence de François Rebsamen, d’Aurélie Filippetti et de Jean-Patrick Gille qui lui a remis son rapport (voir ci-dessous).
Voici les grandes lignes du discours de Manuel Valls ce 19 juin :
– Parce qu’il est nécessaire de respecter le dialogue social et donc l’accord signé par les partenaires sociaux qui concerne l’ensemble des salariés et non les seuls intermittents, l’accord du 22 mars 2014 sera agréé dans son intégralité ;
– Parce qu’il faut sortir de l’insécurité permanente du régime des intermittents attestée par les tensions récurrentes autour de ce régime, une refondation globale du dispositif doit être engagée pour construire un cadre durable et stabilisé. Il ne faut pas ajouter l’insécurité du régime à l’insécurité du métier. Au-delà de la solidarité interprofessionnelle, l’Etat devra jouer son rôle, notamment en matière de financement. les travaux seront menés d’ici la fin de l’année et animés par trois personnalités ;
– Parce qu’une mesure d’apaisement de portée immédiate est nécessaire pour créer les conditions de la réussite de la saison culturelle estivale qui s’ouvre. A titre transitoire et dans l’attente d’une refondation globale, l’Etat prendra lui-même à sa charge le différé d’indemnisation prévu par l’accord. Pour les intermittents, les règles actuelles en matière de différé resteront inchangées.
– Les crédits budgétaires consacrés à la création et au spectacle vivant seront maintenus, intégralement, en 2015, 2016 et 2017.
Il est nécessaire de respecter le dialogue social. L’accord du 22 mars 2014 sera agréé dans son intégralité. Cet agrément entrera en application au 1er juillet 2014. Il répond à trois exigences :
– Il en va du respect de la signature des partenaires sociaux. Ces derniers ont pleinement assumé leur responsabilité en actualisant les règles de financement et d’indemnisation du chômage, dans un contexte où la situation difficile que traverse le pays appelle des réponses courageuses.
– Cet accord, qui ne peut se résumer à ses annexes 8 et 10, est un accord de responsabilité et de progrès : l’accord participe de la maîtrise de la situation financière déficitaire du régime d’assurance chômage dans un contexte économique dégradé où ce dernier joue un rôle d’amortisseur essentiel.
o Les efforts qui en sont le corollaire sont les efforts de tous : employeurs, salariés, demandeurs d’emploi, qu’elle qu’en soit leur statut.
o L’accord introduit des innovations qui bénéficient directement aux salariés les plus précaires : c’est le cas notamment des droits rechargeables à l’assurance chômage.
– Aucun motif en légalité ne permet de fonder un refus d’agrément de l’accord.
Il faut sortir de l’insécurité permanente du régime des intermittents, et bâtir un cadre durable et stabilisé. « Respecter les partenaires sociaux et le dialogue social, c’est aussi accepter de regarder les contradictions d’un dispositif » (PM, 19/06/14). Cette nouvelle crise des intermittents révèle des problèmes systémiques plus profonds que les éléments liés à la mise en œuvre du dernier accord. La répétition des crises (1992, 2003) montre les limites du dispositif.
– Ces limites sont de plusieurs ordres :
o L’existence elle-même des annexes constitue un point de crispation récurrent des négociations d’assurance-chômage. Cette incertitude nourrit un climat d’insécurité du régime qui s’ajoute à l’insécurité qui caractérise au quotidien le parcours professionnels des intermittents ;
o La solidarité interprofessionnelle qui fonde le régime est nécessaire, tous les acteurs entendent la préserver et la maintenir au cœur du système. Elle n’est néanmoins plus suffisante, et la solidarité nationale doit aussi jouer son rôle. Le régime de l’intermittence participe pleinement de la politique culturelle de la France, de son rayonnement par le soutien qu’elle apporte à la création artistique. L’Etat doit prendre sa place autour de la table en ce domaine. Il doit également assumer ses responsabilités en matière de financement ;
o Le régime connaît des dérives dans son fonctionnement reconnues par toutes les parties prenantes. Ces abus fragilisent le régime dans sa globalité. Il faut se donner les moyens d’y mettre un terme au bénéfice des salariés pour qui ce régime est une nécessité pour exercer leurs activités professionnelles et créer.
– Une refondation est donc nécessaire. Elle nécessitera d’innover à partir de l’ensemble des contributions. Les signataires de l’accord du 22 mars 2014 l’avaient anticipé eux-mêmes en prévoyant une concertation tripartite sur le sujet dans leur accord. La réflexion devra s’élargir à l’ensemble des parties prenantes du dossier (« comité de suivi », parlementaires) :
o 3 personnalités animeront ce processus : Hortense Archambault, ancienne directrice du festival d’Avignon ; Jean-Denis Combrexelle, ancien Directeur général du travail ; et Jean-Patrick Gille.
o Les travaux seront menés d’ici la fin de l’année.
Dans l’attente de la refondation du système, les craintes doivent être apaisées sans attendre, et il convient pour cela de créer les conditions nécessaires à la réussite de la saison culturelle estivale qui s’ouvre.
– La menace d’une annulation des festivals constitue un drame pour tous socialement, culturellement et économiquement : artistes et techniciens qui y perdent leur activité, publics qui se voient privés d’un temps fort de la vie culturelle française, collectivités qui voient la dynamique culturelle et économique de leurs villes entravées.
– L’accord du 22 mars 2014 agréé, il doit s’appliquer. Mais ces effets les plus sensibles sur les intermittents doivent être maîtrisés. Un point cristallise les tensions : l’extension du différé d’indemnisation.
– Dans ce contexte et à titre transitoire, dans l’attente de la refondation globale du système, l’Etat prendra lui-même à sa charge le différé de sorte qu’il ne soit pas effectivement appliqué aux intermittents concernés. Pour ces derniers, la situation au regard du différé sera donc inchangée au regard des règles actuelles.
140619RapportMission-UneNouvelleDonnePourIntermittence-JPGille by RegisJuanico
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