Nous avons présenté notre rapport sur la sédentarité avec Marie Tamarelle Veraeghe pour la première fois devant le comité d’évaluation et de contrôle de l’Assemblée Nationale le 21 juillet dernier et avons voulu le centrer sur la question de l’activité physique.
Ce rapport est le fruit d’auditions d’à peu près 90 acteurs de terrain dont beaucoup de ceux qui se sont exprimés lors du colloque de l’ONAPS aujourd’hui, à l’image de François Carré et Martine Duclos qui depuis des années nous alertent sur les dangers de la sédentarité, notamment pour les plus jeunes générations.
Alors pourquoi un rapport sur la sédentarité ?
D’abord parce qu’aujourd’hui on sait que la surcharge pondérale, le surpoids, l’obésité, la sédentarité, sont à l’origine de 10% des décès au niveau mondial. 5 à 6 millions de personnes décèdent de façon prématurées, 600 000 en Europe, plusieurs dizaines de milliers de décès dans notre pays, en France.
La sédentarité, c’est à dire le temps passé en particulier couché ou assis, notamment devant les écrans de loisirs aujourd’hui représente de plus en plus de temps dans la journée notamment les plus jeunes générations. Le temps passé assis, si l’on prend en compte le temps assis à l’école, peut représenter jusqu’à 75% aujourd’hui chez les 14-15ans.
On sait aussi que la diminution de l’activité physique, notamment ces 18 derniers mois, les modes de plus en plus sédentaires, ont des conséquences sur la qualité du sommeil mais aussi sur la qualité de l’alimentation.
Les scientifiques nous alertent depuis maintenant plusieurs années mais aujourd’hui ils nous disent que les jeunes générations, d’ici 2050, vont perdre jusqu’à plusieurs années d’espérance de vie en bonne santé.
On sait que la capacité physique est le premier facteur prédictif de mortalité évitable et donc il y a nécessité bien évidemment pour les pouvoirs publics d’agir.
D’autant plus que la crise sanitaire a aggravé aujourd’hui la santé physique et la santé psychologique notamment des plus jeunes générations. C’est pour ça que nous parlons de bombe à retardement sanitaire.
L’augmentation des temps d’écrans, la diminution d’activité physique, les chiffres que vous avez rappelé tout à l’heure qui datent de 2015 sur la moitié de la population, hommes et femmes confondus qui sont en surpoids ou en obésité.
Mais aussi les chiffres de l’ANSES qui confirment aujourd’hui que 66% de la classe d’âge des 11-17 ans sont dans un risque sanitaire préoccupant avec plus de 2h d’écrans par jour et moins de 60 minutes d’activité par jour.
On sait que le temps d’écran a beaucoup augmenté lors du confinement et même après. Vous avez vu les études qui ont été réalisé notamment par Martine Duclos et l’ONAPS sur les écoles dans le Puy-de-Dôme et l’Allier qui étaient très préoccupantes avec une perte de capacité physique après le premier confinement de 25%.
Tous ces chiffres doivent bien évidemment nous inquiéter et le fil rouge de notre rapport avec Marie Tamarelle c’est de dire simplement : si aujourd’hui on remplace 30 minutes de sédentarité quotidienne par 30 minutes d’activité physique même d’intensité modérée, on fait baisser de 17% la mortalité prématurée.
Si cette activité est une activité intense, nous faisons diminuer la mortalité prématurée de 35%. Si vous êtes dans une activité modérée, vous faites aussi baisser de 30% vos risques d’accidents cardio-vasculaires.
Notre rapport est surtout un manifeste pour l’action publique, un plan de développement des activités physiques pour des modes de vies plus actifs, dès le plus jeune âge.
Cela concerne aussi bien les parents, l’école, la vie associative, le sport scolaire ou universitaire bien évidemment aussi les collectivités territoriales. Nous souhaitons la mobilisation des pouvoirs publics, quand nous parlons d’un grand ministère de la prévention en santé publique, quand nous parlons de grande cause nationale pour 2022 pour l’activité physique en prévision des Jeux Olympiques et Paralympiques de Paris 2024.
C’est surtout des recommandations simples qu’il faut faire dans des grandes campagnes de communication, utiliser aussi les réseaux sociaux pour dire par exemple : on se lève, on s’étire toutes les demi-heures.
On privilégie les modes de transports actifs en particulier tout ce qui est marche, vélo, trottinette sans assistance électrique. Les déplacements en vélo notamment domicile-école, quand il y a des pistes cyclables sécurisées. On utilise en milieu professionnel les bureaux réglables, on privilégie l’escalier par rapport à l’ascenseur.
Ces recommandations doivent être associées à une information et des dispositifs de soutien à la parentalité sur la question des temps d’écran qui sont aujourd’hui des sources de conflits dans toutes les familles parce qu’utilisation d’écrans parfois le matin, pendant les repas, avant de se coucher, dans le chambre. Il y a nécessité là à mieux accompagné les parents qui sont parfois en difficulté parce qu’eux-mêmes ne donnent pas vraiment l’exemple sur les écrans.
Et puis dans notre rapport, nous proposons aussi de rendre beaucoup plus accessible et régulier les tests de conditions physiques ou de forme. En particulier de le faire dans les entreprises avec le concours des services de santé au travail. Nous travaillons à Saint-Étienne en ce moment avec Guillaume Millet, que vous connaissez bien, sur un prototype de tests de conditions physiques mobiles qui s’appelle Selfit : 10 tests en une heure.
Vous connaissez aussi le dispositif « tous en forme » dans les universités initié par Thierry Barriere et Philippe Decq. Il faut rendre ces tests systématiques, notamment dès l’école et tout au long de la vie.
Nous avons un problème avec la médecine scolaire à l’école. 18% des visites médicales de 6ème année et seulement 62% des bilans infirmiers en 12ème année sont réalisés. Nous avons besoin de tests de conditions physiques plus régulièrement pour nos enfants.
Sur l’EPS en particulier, nous proposons à un moment de décrochage sportif important, la puberté et l’adolescence, de passer de 2h à 3h d’EPS obligatoire au lycée.
Et puis de généraliser le dispositif 30 minutes d’activité physique à l’école par jour en complément de l’EPS et je dirais même en complément de la recommandation de l’OMS qui est de dire au moins une heure d’activité physique pour nos enfants.
Nous en sommes aujourd’hui seulement à 2 000 voire 3 000 écoles concernées par ce dispositif donc c’est trop peu par rapport à nos 50 000 écoles aujourd’hui et 12 millions d’élèves au niveau national. Il faut aujourd’hui passer à la vitesse supérieure.
J’en termine sur deux ou trois recommandations. Vous avez parlé de vélo, il faut que le plan vélo soit mieux financé bien évidemment et en particulier le savoir rouler à l’école et qu’on implique beaucoup plus nos clubs cyclistes comme la fédération des usagers de la bicyclette.
Il faut aussi se lancer dans une politique de design actif. Nous sommes en train d’y travailler avec Thierry Modon à la cité internationale du Design à Saint-Étienne avec un certain nombre d’expérimentations dans des villes moyennes en France.
Le Design actif c’est l’aménagement des espaces publics, les équipements sportifs de proximité, l’aménagement des sentiers, des pistes, des parcs, enfin tout ce qui peut contribuer à faire mouvement dans la société à tous les âges de la vie et surtout à proximité des lieux d’habitation.
En conclusion, je souhaitais aborder la prescription de l’activité physique adaptée. Il faut qu’elle soit beaucoup plus accessible et pour cela il faut une prise en charge par l’assurance maladie des consultations spécifiques, notamment des premiers bilans médicaux sportifs et motivationnels préalables.
C’est un coût financier, je crois, qui est tout à fait supportable pour l’assurance maladie, ce qui permettrait aujourd’hui, en particulier de « booster » les activités physiques adaptées.
Les maisons sport-santé se développent, on en compte 250, elles ont vocation à avoir ce rôle de guichet unique et puis nous devons encourager financièrement les mutuelles avec des taxes de solidarité additionnelle qui doivent être modulées en fonction de la prise en charge financière des patients en activités physiques adaptées.
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