Dans une tribune parue dans le Monde, Benoît Hamon, ex-Ministre et ex-candidat à l’élection présidentielle, appelle la gauche et les écologistes à s’unir pour ce « dernier rendez-vous » face à l’urgence climatique et sociale.
L’ex-candidat appelle la gauche et les écologistes à s’unir pour ce « dernier rendez-vous » face à l’urgence climatique et sociale. Lire la tribune sur le site du Monde
Le texte de la Tribune :
Les désaccords sont-ils si nombreux parmi les formations écologistes et de gauche qu’ils rendent l’unité impossible? La question mérite d’être posée. Après tout si les divergences dominent les convergences, épargnons nous le simulacre de vaines réunions de famille qui ajouteront une couche supplémentaire de dépit et de déception dans l’électorat de gauche.
Avant de parcourir les programmes, regardons le contexte. Les raisons politiques de s’unir sont évidentes.
Tous à gauche et dans l’écologie politique intiment au pays de prendre les bonnes décisions pour engager la transformation du modèle de développement de la France et de l’Europe, opérer la bifurcation écologique et viser la neutralité carbone de notre économie.
Le compte à rebours climatique égrène ses dernières secondes utiles, quand la volonté collective peut encore s’exercer et éviter partiellement l’irréparable et l’irréversible dans les impacts de l’activité humaine et du capitalisme sur le climat et la biodiversité. 2022 est le dernier rendez-vous. Parier sur 2027 serait criminel. Il faut un gouvernement de transition écologique dés 2022.
L’urgence sociale est de même nature. À force d’étirer les inégalités, notre pays se désagrège et ni son système éducatif ni son modèle social ne peuvent compenser l’injustice d’une polarisation de plus une plus extrême des richesses. 2022 est le dernier rendez-vous.
Passer son tour serait criminel quand on connait la fragilité de la démocratie, le désir de millions de français de sévir ensemble et de s’en remettre à un pouvoir autoritaire. Il faut un gouvernement de justice sociale dés 2022.
Ce gouvernement de la transition écologique, de la réparation et la justice sociale n’est possible qu’à la seule condition que la gauche et les écologistes atteignent le second tour de l’élection présidentielle.
Elémentaire. Le second tour n’est accessible à un.e candidat.e de la gauche et de l’écologie que si, il ou elle, est soutenu.e par tous dès le premier tour. Deux fois élémentaire. Unies, la gauche et l’écologie peuvent diriger le pays en 2022. Trois fois élémentaire, implacable et rationnel.
Mais on rétorquera que l’affaire est compliquée par des divergences idéologiques insurmontables. Regardons-y de plus près. Les différences entre la France Insoumise, les écologistes et les socio-démocrates sont-elles si grandes?
Tous sont favorables à une plus grande progressivité de l’impôt sur les revenus comme sur le patrimoine. Tous plaident pour une fiscalité écologique qui oriente les choix des ménages et les investissements des entreprises vers l’efficacité et la sobriété énergétique.
Tous les programmes se rejoignent pour contenir « l’emballement » du climat, viser la neutralité carbone de notre économie, répondre à la raréfaction des ressources fossiles, maîtriser les risques technologiques et environnementaux, reconstituer la biodiversité, basculer progressivement l’agriculture française vers l’agro écologie et le bio.
Qu’ils nomment notre époque capitalocène ou anthropocène, tous estiment aux diapason du consensus scientifique mondiale que l’humanité peut et doit exercer sa volonté sur le cours des choses pour dévier la trajectoire au désastre écologique.
Tous s’accordent enfin sur l’idée que cette indispensable transition écologique ne saurait être confiée au seul court-termisme de la main aveugle et trop visible du marché. Après, peu importe les mots employés pour le caractériser : planification écologique, pilotage par la puissance publique nationale et locale, économie mixte structurante, l’idée est là et elle distingue depuis toujours la gauche des libéraux.
Tous plaident pour des mesures fortes de soutien aux revenus des français. Tous militent pour l’éradication de la pauvreté, l’accès de tous à un logement décent et à la santé. Tous plébiscitent la reconnaissance d’un 5ème risque et une prise en charge de la dépendance qui rétablisse la dignité de personnes.
Tous veulent aussi légiférer sur la fin de vie. Si le revenu universel, qui se heurtait en 2017 à des esprits hermétiques ne fait pas encore l’unanimité, il convainc désormais une majorité de citoyens à gauche qu’il peut être un instrument incomparable de pré-distribution des richesses, de démocratisation de l’économie et d’émancipation des personnes.
Tous s’accordent sur la nécessité absolue de répondre à la crise du projet républicain par un nouveau contrat entre l’école et la nation qui en finisse avec le tri par l’échec, la reproduction sociale, les archaïsmes de l’évaluation et de l’orientation des élèves, et qui améliore la carrière et la formation initiale et continue des enseignants.
La République ne divise pas la gauche et l’écologie. Par pitié, ne laissons pas les ennemis historiques de la République, ceux qui ont fomenté contre elles, attentats et complots, dicter les débats sur la laïcité, les discriminations et l’égalité femme/homme. Pas davantage, n’acceptons de la part d’un gouvernement qui réduit les libertés publiques et démolit l’égalité la moindre leçon de République.
Tous (ou presque) sont favorables à la VIème République. Jean Luc Melenchon et moi-même l’avons défendue lors de l’élection présidentielle en 2017 au nom des Insoumis, socialistes et écologistes. Reste à partager un projet qui dissipe le désenchantement démocratique et associe vraiment les citoyens aux décisions qui les concernent. Mais il n’est pas une femme ou un homme gauche qui soutienne encore l’hyper-présidence combinée à l’hyper-technocratie de l’actuel quinquennat.
Tous veulent lutter contre le racisme et les discriminations. Tous veulent que la police soit réformée en profondeur.
Reste l’Europe qui divise. Tant que ça ? Les socialistes se sont ralliés à la stratégie de l’endiguement de la dette publique européenne à commencer par celle contractée pour faire face à la crise sanitaire. Toute la gauche et l’écologie politique est opposée au délirant programme d’austérité transmis par Emmanuel Macron à la Commission européenne pour les 5 ans à venir.
Tous refusent désormais de signer de nouveaux traités de libre échange et préconisent une politique de protection aux frontières des préférences européennes, taxe carbone en tête. Des différences de stratégies existent, sur la place du couple franco allemand, sur la démocratisation de la zone euro et sur le bon usage du rapport de force dans le fonctionnement des institutions européennes. Mais est-ce cela, tout ce qui pourrait justifier ne pas travailler ensemble à un programme et un.e candidat.e unique en 2022?
La gauche et l’écologie vont se retrouver samedi 17 avril pour débattre. Mettons nous d’accord sur nos désaccords et agrégeons ce qui nous réunit. Abandonnons l’acrimonie et le ressentiment à nos adversaires communs.
Ceux qui dérouteront énergies et espoirs de cette voie de l’unité perdront crédit et légitimité au moment d’appeler à voter pour eux au nom de l’urgence climatique, sociale ou démocratique. Car si c’est urgent, il faut s’unir. Parce que c’est urgent, nous allons nous unir.
Une fois notre socle commun d’ambition pour la France et pour les Françaises et les Français arrêté, il sera temps de réfléchir sereinement aux critères nous permettant de désigner celui ou celle qui nous représenterait tous lors de l’élection présidentielle.
De tous les responsables de la gauche et de l’écologie qui se retrouveront ou seront représentés le 17 avril prochain, aucun n’est par principe indigne de porter les couleurs de notre espoir collectif retrouvé. Aucune oukase ne doit être mise sur les personnes en raison de nos divisions passées. Seul comptera l’avenir que nous voudrons écrire ensemble.
Benoit Hamon
Ancien Ministre
Ancien candidat à l’élection présidentielle
Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.
Si toutes les forces de la Gauche et les diverses formations des Écologistes ne parviennent pas à se mettre d’accord sur un socle, sur un programme communs et à désigner un.e candidat.e aux élections présidentielles de 2022, je n’irai pas voter pour la 1ère fois de ma vie de citoyenne.
Le Front national ou la Droite seront au pouvoir et toutes nos espérances d’une gouvernance pour une France plus démocratique et plus juste seront anéanties. Et moi je serai une citoyenne désespérée et amère.
Si les forces de gauche et écologie ne font pas front commun, pour la première fois de ma vie de citoyen, je n’irai pas voter.