Suite aux récents abus constatés conduisant à la fermeture de sites et à de nombreux licenciements de salariés, j’ai déposé une proposition de loi avec ma collègue Laurence Dumont, Députée du Calvados et 49 collègues visant à supprimer la possibilité ouverte au dirigeant d’une entreprise de déposer une offre de rachat de cette même entreprise après avoir organisé son dépôt de bilan.
Cette possibilité a été ouverte par une ordonnance gouvernementale du 20 mai 2020. En quelques semaines, certains dirigeants d’entreprises ont profité de cet effet d’aubaine pour effacer une partie de leurs dettes, faciliter les licenciements des salariés puis récupérer leur entreprise ainsi allégée alors qu’elle était déjà en difficulté avant la pandémie.
Si le gouvernement s’est engagé à ne pas prolonger cette ordonnance au delà de sa date limite, celle du 31 décembre 2020, nous regrettons que le gouvernement ne l’ait pas abrogée dès nos premières alertes. Des centaines de salariés d’Orchestra Premanan, de Phildar, d’Alinéa ou d’Inteva Products ont vu entre temps leur emploi disparaître.
Dans le contexte économique et social que nous connaissons, nous ne pouvons tolérer la remise en cause de dispositifs prévus pour protéger les salariés et les créanciers.
L’ordonnance n°2020-596 du 20 mai 2020 portant adaptation des règles relatives aux difficultés des entreprises et des exploitations agricoles aux conséquences de l’épidémie de Covid-19, autorise la cession de tout ou partie des actifs d’une société en difficulté à son dirigeant en cas de maintien d’emplois, à contre-courant de l’article L642-3 du Code de commerce qui interdit notamment au dirigeant d’une société en procédure collective de présenter une offre de reprise de tout ou partie des actifs de sa société.
Ce procédé de dépôt de bilan-rachat, sans aucun garde-fou ni contrepartie, est fortement décrié aujourd’hui, dans la mesure où il semble avoir créé un réel effet d’aubaine pour certains dirigeants peu scrupuleux.
Le recours à ce dispositif s’est en effet multiplié ces derniers mois (Camaïeu, Inteva Products, Orchestra Prémaman, Phildar…), engendrant très régulièrement des reprises s’accompagnant de suppressions massives d’emplois et de l’effacement de dettes.
Au niveau local, nous avons pu mesurer les effets néfastes de cette ordonnance cet été lors de la liquidation-reprise d’Alinea, qui a laissé la plupart des 75 salariés du magasin de Villars sur le carreau.
Pour de nombreux élus locaux et organisations syndicales, une telle disposition s’apparente en définitive à un permis officiel de licencier sans aucune entrave, bien utile pour « masquer » des difficultés de gestion parfois anciennes sous couvert du Coronavirus.
De tels comportements, incompréhensibles en pleine crise économique et sociale du fait de la pandémie de Covid-19, illustrent une réalité : à force d’assouplir les règles de droit commun pour faciliter les reprises et éviter les faillites, on remet en cause des dispositifs pourtant prévus pour protéger les salariés et les créanciers, et on ouvre ainsi la voie aux dérives et aux fraudes.
Cette proposition de loi entend mettre un terme à cette dérive qui provoque de nombreux scandales sociaux en revenant au droit commun.
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