Semaine du 23 au 29 mai

Avec ma collègue Députée Christine Pirès-Beaune et Matthieu Caron, directeur général de l’observatoire de l’Ethique Publique, nous avons écrit une tribune « Secret dépense » parue sur le site Libération.fr.
Notre travail de contrôle par le biais de questions écrites adressées au Premier Ministre amène un timide début de transparence sur le train de vie de l’exécutif .
On apprend en particulier que les Ministres disposent d’une enveloppe de frais de représentation pouvant atteindre 150 000 euros par an.
Le texte de la Tribune :
Par Régis Juanico et Christine Pirès-Beaune , députés et membres de l’Observatoire de l’éthique publique) et Mathieu Caron, directeur général de L’Observatoire de l’éthique publique — 19 juin 2019
Dans le cadre de nos travaux au sein de L’Observatoire de l’éthique publique, nous avons décidé d’adresser un certain nombre de questions écrites au Premier ministre afin de faire la lumière sur le train de vie du pouvoir exécutif. Les premières réponses du chef du Gouvernement publiées au journal officiel apportent des éclairages inédits qui pourraient faire progresser la transparence de la vie publique.
La principale découverte est la suivante : Matignon nous a appris que chaque membre du Gouvernement dispose d’une dotation de frais de représentation plafonnée à 100 000 euros pour un secrétaire d’Etat, à 120 000 euros pour ministre placé auprès d’un ministre et à 150 000 euros par un an pour un ministre (Question n°16056 du 22 janvier 2019).
L’on savait que les parlementaires disposaient d’une avance mensuelle de frais de mandat de 5400 euros ; l’on sait désormais qu’un ministre peut disposer en moyenne de 12 500 euros par mois ! Reste à savoir ce que finance exactement cette enveloppe de frais de représentations.
Nous poserons dans les prochains jours de nouvelles questions pour obtenir des précisions. Mais, dès lors que cette information est publique, ne serait-il pas judicieux que le Premier ministre instaure un contrôle déontologique de ces frais comme il en existe un désormais à l’Assemblée ?
La seconde découverte laisse songeur : la président de la République s’est engagé à rembourser toutes ses dépenses personnelles comme le faisait d’antan le général de Gaulle.
Si le chef de l’Etat procède bien au remboursement des dépenses d’alimentation des membres de sa famille conviés dans les résidences présidentielles de Brégançon et de La Lanterne, une réponse laisse supposer qu’il ne prend pas en charge les frais de bouche de ces derniers lorsqu’ils sont reçus à l’Elysée (QE n°16542).
Autres menues découvertes : vingt et un anciens Premiers ministres et ministres bénéficient d’un dispositif de sécurité spécial à la charge du contribuable (QE n°16310) ; quarante membres des cabinets ministériels auraient déjà « pantouflé » depuis juin 2017 (QE n°16060) tandis que cinq membres de cabinet auraient été promus préfets (QE n°16061).
L’ennuyeux de l’histoire c’est que plusieurs questions demeurent encore sans réponse. Un sujet semble tout particulièrement embarrassant : celui du train de vie des cabinets ministériels. Si depuis le début des années 2000, la création d’un jaune budgétaire sur les cabinets ainsi que les questions écrites de René Dosière ont permis de faire la transparence sur la rémunération des collaborateurs ministériels, les budgets de fonctionnement des cabinets demeurent introuvables.
Le Gouvernement ne semble toujours pas résolu à nous transmettre ces données comme en témoigne son silence (QE 16294 à n°16303). La CADA et le Tribunal administratif de Paris ont pourtant jugé qu’il s’agissait là de documents communicables (Avis Cada n°20132470 du 23 mai 2013 et TA, n°1312624 du 16 décembre 2014).
A cette heure, d’autres questions demeurent également non renseignées : celles sur les marchés publics passés par le Gouvernement et ses cabinets (QE n°16245 et 16308) ; celle sur le régime de cotisation retraite des membres du Gouvernement (QE n°16295) ; celle sur le cumul d’indemnité des membres du Gouvernement avec des mandats locaux (QE n°16296) ; celle sur les déplacements du pouvoir exécutif par voie aérienne (QE n°16539) ou celle sur les conditions d’octroi des passeports diplomatiques (QE n° 16584).
Au surplus, certaines réponses apparaissent pour le moins vaporeuses. Nous avons demandé la communication à l’euro près des dépenses publiques engagées pour les anciens présidents de la République. En guise de réponse, nous avons obtenu un inventaire des grandes masses de dépenses. De même, le Premier ministre ne nous a-t-il pas précisé si les anciens chefs de l’Etat pouvaient être logés dans les locaux meublés mis à leur disposition comme nous lui avions demandé (QE n°16240 à 16244).
Concernant le président de la République en exercice, nous avons appris que celui-ci n’avait sollicité aucune société de sondage ni aucune société de conseils aux frais de l’Elysée (QE n°16013). Or, le Premier ministre n’a pas répondu à cette même question (QE n°16063) ce qui laisse préjuger que Matignon commande ce type de prestations, voire qu’il en fait bénéficier la présidence de la République indirectement.
Enfin, conformément au décret du 3 février 2011, les membres du Gouvernement peuvent confier des missions à des personnalités qualifiées. Si nous avons obtenu communication de la liste de ces missions, nous ne connaissons toujours pas l’identité des personnes missionnées ni le montant de leur indemnisation pour écarter tout risque de « République des copains » (QE n°16059).
Le pouvoir exécutif ne saurait continuer à fonctionner comme une boîte noire. Si l’Exécutif peut légitiment continuer à exciper du secret défense quand il s’agit des intérêts supérieurs de la nation, il est grand temps qu’il lève définitivement le « secret dépense » pour parachever le droit gouvernemental. Nous comptons sur le Premier ministre pour qu’il ne s’arrête pas en si bon chemin.
Matthieu Caron (Directeur général de L’Observatoire de l’éthique publique)
Régis Juanico et Christine Pirès-Beaune (Députés et membre de l’Observatoire de l’éthique publique)
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Très bon travail, pourquoi ne pas l’avoir fait plus tôt? Je suppose que les budgets des précédents exécutifs n’étaient pas plus vertueux??
Bon week-end