Jeudi 27 septembre en fin de matinée, le comité d’évaluation et de contrôle des politiques publiques (CEC) a autorisé la publication du rapport sur l’évaluation du système éducatif dont j’étais le co-rapporteur avec la députée de l’Eure Marie Tamarelle-Verhaeghe (LREM ).
L’évaluation de notre système éducatif doit être synonyme de plus-value et de progrès pour l’école en lui permettant de faire évoluer, de manière réfléchie, sa mission éducatrice.
Or, dans la situation actuelle, la valeur du système scolaire ne peut pas être véritablement appréciée, en raison de la dispersion et du manque de cohérence des outils de mesure des apprentissages des élèves.
Ainsi, les évaluations « repères » mises en œuvre en cette rentrée pour mesurer les compétences en français et en mathématiques des élèves de CP, de CE1 et de 6ème sont très utiles, mais en décalage avec l’organisation des cycles pédagogiques : le cycle 3 débute par la classe de CM1 et le cycle 4 par celle de 5ème… La logique des cycles, qui vise à donner aux élèves le temps d’atteindre, en trois ans, les objectifs fixés à la fin de chaque cycle, n’est ainsi pas prise en compte par les tests standardisés du ministère !
Autre constat : la faible part du budget consacré à l’évaluation dans le budget de l’enseignement scolaire – à peine plus de 3 millions sur 68 milliards d’euros (chiffres 2017), soit moins de 0,1%…
Depuis février dernier, nous avons auditionné 61 acteurs de terrain, chercheurs et responsables de l’administration centrale et des corps d’inspection. Nous nous sommes également rendus dans l’Eure, à la rencontre d’équipes pédagogiques et de parents d’élèves.
Nous formulons ainsi 12 propositions articulées autour de trois axes :
Je veillerai à ce que ces préconisations puissent être concrétisées à travers le futur projet de loi annoncé par le ministre de l’Education nationale pour début 2019.
Le détail de notre présentation :
PPT systeme educatif anime? V4 by Pierrick Courbon on Scribd
Synthèse du rapport :
Le CEC a inscrit à son programme de travail une évaluation de l’organisation de la fonction d’évaluation du système éducatif pour laquelle il a demandé l’assistance de la Cour des comptes.
Ce sujet d’apparence technique revêt une importance clef : ce domaine d’évaluation doit être synonyme de plus-value et de progrès pour l’école, en lui permettant de faire évoluer, de manière réfléchie, sa mission éducatrice.
En outre, l’importance des ressources budgétaires consacrées à l’éducation nationale et leur croissance rapide rendent indispensable une appréciation fine et contextualisée de la valeur de notre système scolaire, cette information devant être accessible aux familles. On ne peut, à cet égard, qu’être interpellé par le décalage entre le budget de l’enseignement scolaire (68 milliards d’euros en 2017) et celui consacré à son évaluation (à peine plus de 3 millions d’euros).
À la suite des constats de la Cour des comptes venue présenter ses travaux au CEC en février 2018, nous avons entendu 61 acteurs de terrain, chercheurs et responsables de l’administration centrale et des corps d’inspection. Nous nous sommes également rendus dans l’Eure, à la rencontre d’équipes pédagogiques et de parents d’élèves.
Nous formulons aujourd’hui 12 propositions articulées autour de trois axes :
les outils nationaux d’évaluation du système scolaire et de ses agents doivent être renforcés ;
les outils locaux doivent aider les élèves et les établissements à progresser ;
la simplification et la mise en cohérence des instances ministérielles chargées de l’évaluation doivent être engagées.
Aujourd’hui, l’appréciation de la valeur du système scolaire ne peut être vraiment réalisée, en raison de la dispersion et du manque de cohérence des outils de mesure des apprentissages des élèves.
Ainsi, les évaluations « repères » mises en œuvre à la rentrée 2018 pour mesurer les compétences en français et en mathématiques des élèves de CP, de CE1 et de 6ème sont très utiles, mais en décalage avec l’organisation des cycles pédagogiques : le cycle 3 débute par la classe de CM1 et le cycle 4 par celle de 5ème… La logique des cycles, qui vise à donner aux élèves le temps d’atteindre, en trois ans, les objectifs fixés à la fin de chaque cycle, n’est, pour l’heure, pas prise en compte par les tests standardisés du ministère.
En outre, les acquis des élèves sont évalués de manière morcelée. En effet, alors que l’éducation nationale évalue beaucoup, et depuis longtemps, ses résultats, elle n’a pas réorganisé ses évaluations autour du socle commun de connaissances et de compétences, qui est l’objectif premier de la scolarité obligatoire depuis la loi du 23 avril 2005 sur l’avenir de l’école.
Aussi, chaque année, une quinzaine d’évaluations sont conduites, mais seul un petit nombre d’entre elles se réfèrent à la mesure des connaissances et des compétences du socle commun. La plupart poursuivent un tout autre objet, comme la maîtrise des programmes scolaires (dispositif « CEDRE »), les performances en lecture (testées lors des journées « Défense et citoyenneté ») ou encore l’acquisition des compétences clefs définies par des entités internationales (l’OCDE, l’IAE, etc.).
Marie Tamarelle :
Les évaluations pratiquées par les enseignants en classe, quant à elles, obéissent trop souvent à une logique négative.
L’approche traditionnelle de l’évaluation en classe est fondée sur la notation chiffrée et centrée sur le classement des élèves. Cette pratique ancienne est encore très présente dans le second degré où elle est liée à l’orientation des élèves et à la hiérarchisation des filières.
Or la note chiffrée évalue « en creux » (ce sont les fautes qui sont comptées, et non ce qui est acquis), décourage, dégoûte et touche bien souvent la personne plus que ses acquis.
De plus, cette notation n’est pas fiable, car les correcteurs, même avec un barème, notent différemment un élève supposé bon ou mauvais, un garçon ou une fille, un devoir situé au début ou en fin de correction, etc. Enfin, cette forme d’évaluation laisse peu de place à la coopération entre les enseignants et les élèves. Ainsi, les enseignants français utilisent moins souvent que leurs homologues des pays voisins des barèmes communs et des dispositifs d’autoévaluation.
L’évaluation des personnels est perfectible.
Le protocole « parcours professionnels, carrières et rémunérations » de 2016 ouvre la voie à une amélioration de l’évaluation des enseignants.
La suppression de la notation des enseignants met fin à un dispositif unanimement décrié, centré sur l’enseignement du programme en classe et laissant ainsi de côté des pans entiers du travail du professeur, comme les activités interdisciplinaires, la concertation en équipe pédagogique, l’organisation et le suivi des stages, l’orientation des élèves, etc.
Le nouveau dispositif d’évaluation est constitué de trois « rendez-vous de carrière », qui s’articulent autour d’une inspection en classe, d’un entretien avec l’inspecteur et, pour le second degré, d’un entretien avec le chef d’établissement. À l’issue de ces rencontres, l’inspecteur et, dans le second degré, le chef d’établissement complètent une grille de onze compétences, qui fait apparaître des critères liés au travail en équipe et à la pédagogie.
Cette procédure prive toutefois les enseignants d’échanges avec les inspecteurs pendant une longue période : aucune inspection n’est prévue entre le troisième rendez-vous, c’est-à-dire la 21ème année d’ancienneté, et la retraite. En outre, les avancements de grade sont trop encadrés : tous les enseignants avancent à l’ancienneté, sauf pendant deux années et pour 30 % d’entre eux seulement ; par ailleurs, seule une minorité d’entre eux pourront accéder au nouveau grade, celui de la classe exceptionnelle. Cette évolution de carrière très normée risque de générer, chez nombre d’agents, de la frustration…
? S’agissant des responsabilités des chefs d’établissement, il nous semble important qu’elles soient définies avec précision pour que leur action puisse être évaluée. Plusieurs pays (Pays Bas, Angleterre, Nouvelle Zélande) ont élaboré, dans ce but, de véritables normes professionnelles, qui donnent un rôle important à la direction de l’établissement en matière de formation continue des enseignants qui y sont affectés.
Or notre pays ne prévoit pas de grilles d’évaluation pour les chefs d’établissement et les directeurs d’école, alors que des textes détaillent, avec précision, les compétences requises pour exercer ces fonctions.
La France fait figure d’exception en matière d’évaluation des établissements.
L’évaluation des établissements s’est progressivement généralisée en Europe, avec la conviction que l’amélioration de la qualité de chaque unité éducative est le meilleur moyen d’améliorer la qualité globale du système. Il y a dix ans, plusieurs pays, comme la Belgique francophone ou la Pologne, ont décidé que l’inspection scolaire n’évaluerait plus les personnes mais les établissements.
En France, plusieurs initiatives académiques ont été prises au début des années 2000 mais restent marginales et fragiles. Ces démarches suscitent en effet la méfiance :
– en raison du poids de l’évaluation/notation négative dans l’institution scolaire : les responsables d’un système habitué à juger et à trier les élèves sont les plus fondés à craindre que la mise en œuvre d’un dispositif d’évaluation des établissements ne précède la mise en cause de ceux qui y travaillent ;
– en raison d’un sentiment d’évaluation permanente éprouvé par les chefs d’établissement du second degré, qui ne cessent de rendre compte de leur action, que ce soit lors du bilan annuel devant le conseil d’administration, du dialogue de gestion avec le rectorat sur l’attribution des moyens, de l’élaboration ou du suivi du contrat d’objectifs signé avec les autorités académiques, des enquêtes demandées par les recteurs ou la DGESCO sur l’état d’avancement des réformes…
Ces réticences vis-à-vis de l’évaluation des établissements conduisent à ce que celle-ci se fasse « sur le trottoir », par le bouche à oreille, qui reste, par définition, le vecteur des rumeurs ou des approximations. Il faut surmonter cette défiance en montrant que c’est l’intérêt de tous les acteurs, des personnels comme des usagers, de mettre en place un dispositif d’évaluation des écoles et des établissements fondé sur la confiance, le respect des équipes et la volonté d’améliorer les pratiques professionnelles.
Régis Juanico :
Nous en venons à nos propositions.
Il nous semble, d’abord, que la mesure nationale des connaissances et des compétences des élèves doit être régulière et centrée sur le socle commun. En outre, cette mesure doit répondre à une finalité pédagogique.
Tel est l’objectif des évaluations « repères » mises en place au primaire et au collège par le ministère de l’éducation nationale et qui visent à permettre aux enseignants de CP, de CE1 et de 6ème d’établir le « profil » des élèves accueillis et d’adapter ainsi, par rapport aux besoins constatés, leurs pratiques pédagogiques.
Nous estimons toutefois que la vocation pédagogique des évaluations nationales serait mieux assurée si :
les enseignants étaient associés en amont et en aval des évaluations,
les évaluations tenaient compte des cycles du primaire et du collège,
les enseignants pouvaient s’appuyer sur un réseau de personnes ressources, susceptibles de les aider à concevoir l’accompagnement le plus adapté pour les élèves dont les acquis se révèlent fragiles.
Par ailleurs, les résultats des évaluations nationales doivent être contextualisés et ne pas être instrumentalisés à des fins autres que pédagogiques.
Pour être utile, une évaluation doit être diagnostique, en identifiant les forces et les faiblesses des acquis scolaires, formative, en incitant l’enseignant à adapter ses pratiques pour améliorer les conditions d’apprentissage, et contextualisée, pour « situer » les résultats des élèves.
Les résultats des évaluations ne doivent pas conduire à émettre un jugement sur la qualité des enseignants et des établissements ? des travaux universitaires ont souligné les effets pervers de telles évaluations ? ou servir au pilotage de l’allocation des moyens, cette mesure risquant de transformer la procédure d’évaluation en outil de mise en concurrence des établissements.
À la suite de nos constats portant sur les évaluations nationales standardisées, nous formulons les propositions suivantes :
– évaluer par des tests numériques les acquis des élèves en français et en mathématiques au début de chaque cycle d’enseignement à l’école primaire et au collège (CP, CM1, 5ème) ;
– mettre en perspective les résultats en adressant des questionnaires sur le contexte socioculturel et le climat scolaire aux élèves, à leurs parents et aux établissements ;
– mettre en place un réseau de personnes ressources pour accompagner les enseignants voulant adapter leurs pratiques pédagogiques et assurer ainsi un service d’aide « post-évaluation ».
Les 5 principes :
centrer les évaluations des acquis en français et en mathématiques sur le socle commun
utiliser des tests numériques au début de chaque cycle d’enseignement (CP,CM1,5e )
contextualiser les résultats de ces tests via des questionnaires sur les caractéristiques sociales, culturelles et le climat scolaire des établissements
ne pas lier ces résultats à l’évaluation des enseignants et à l’allocation des moyens
mettre en place un réseau de personnes ressources pour accompagner les enseignants voulant adapter leurs pratiques pédagogiques et assurer ainsi un service d’aide « post-évaluation ».
S’agissant de l’évaluation de la performance du système scolaire, les études sur échantillons du ministère nous paraissent pertinentes pour mesurer, de manière fine et régulière, cette efficacité.
Parmi ces opérations, il convient de mettre en avant trois d’entre elles, qui permettent d’apprécier l’évolution de la performance du système scolaire :
– les évaluations « CEDRE » sur les compétences des écoliers et des collégiens, qui permettent, tous les cinq ans, de répartir les élèves dans six groupes de compétences ;
– les panels d’élèves, qui permettent de suivre les destins scolaires selon le milieu social ou le niveau des élèves ;
– les évaluations de dispositifs pédagogiques particuliers, en particulier l’étude de l’impact du dédoublement des classes de CP en REP+, qui a débuté à la rentrée 2017 et qui reposera sur le suivi de 15 000 élèves.
Qu’il s’agisse d’évaluations globales de l’efficacité des écoles et des collèges ou de l’étude de réformes précises, la méthodologie employée apparaît pertinente et suffisante pour éclairer les praticiens de l’éducation comme les citoyens, le Gouvernement comme le Parlement.
Marie Tamarelle :
S’agissant des évaluations en classe, il nous paraît nécessaire de passer d’une évaluation des apprentissages à une évaluation pour les apprentissages.
La fonction des évaluations en classe devrait changer pour ne plus en faire des outils de sélection, mais pour les intégrer dans les processus d’apprentissage, afin d’accompagner le travail des élèves.
L’évaluation positive et formative devrait reposer sur plusieurs outils, notamment :
– des corrections qui font ressortir les progrès plutôt que l’atteinte d’une norme ;
– un autre regard sur l’erreur, l’élève devant avoir le temps d’essayer, de se tromper, d’analyser son erreur, d’essayer à nouveau, jusqu’à ce que le devoir ou l’exercice soit réussi ;
– le recours à des séquences expérimentales pour valoriser les capacités d’observation et les facultés d’analyse intuitive des élèves ;
– la co-évaluation (évaluation par les pairs, pratiquée par les élèves) et l’autoévaluation, qui encouragent l’élève à mieux comprendre et à mieux se situer par rapport aux apprentissages attendus ;
– le déclenchement d’une aide pédagogique ou de méthodes de travail adaptées pour remédier aux difficultés identifiées ;
– la constitution d’un portfolio de l’élève, qui rassemble de façon continue ses réalisations scolaires et ses travaux individuels ou collectifs et atteste ainsi de ses progrès, de ses essais, de ses compétences et de ses acquis.
Les compétences psychosociales des élèves devraient être également évaluées, car elles se réfèrent au fondamental « savoir-être », qui englobe le respect des autres et des règles communes, le discernement, les comportements favorables à la promotion de la santé, etc.
Enfin, les compétences sociales et civiques des élèves doivent être reconnues. Pour ce faire, des outils, déjà mis en place mais pas ou peu utilisés, pourraient renforcer et valoriser leur prise en compte :
– L’application Folios, un outil numérique au service des élèves et des équipes pédagogiques, permet aux élèves de garder, de l’école primaire jusqu’au lycée, la trace de leurs expériences et de leurs engagements, scolaires et extrascolaires.
– Un livret citoyen devait, à partir de 2017, être remis aux élèves, lors de la cérémonie républicaine de remise du diplôme national du brevet, ce document récapitulant toutes les formes d’engagement prises par les élèves durant leur scolarité obligatoire, en faisant référence à celles mentionnées dans l’espace personnel de leur application Folios. Ce dispositif a été reporté alors qu’il gagnerait à être rapidement mis en œuvre.
Les enseignants doivent par ailleurs être formés à l’évaluation.
Le savoir?faire pédagogique et les compétences psychosociales, qui permettent de comprendre le développement cognitif et affectif des élèves et d’analyser leurs besoins, ne figurent pas toujours, hélas, au premier rang du cursus des étudiants qui préparent les concours de recrutement des enseignants.
La compétence d’évaluation devrait donc être inscrite au cœur de la formation initiale des enseignants : les futurs professeurs devraient comprendre qu’on se forme à l’évaluation (en suivant un enseignement dédié à l’université), qu’on se forme en évaluant (lors des stages) et que certaines formes d’évaluation peuvent être plus favorables aux apprentissages que d’autres.
Le bien-être des élèves est une composante importante et mesurable de la réussite scolaire
Le bien-être est mesurable ainsi que le montrent de nombreux travaux universitaires
Depuis le milieu des années 1990, la recherche sur le « climat scolaire » a permis de prendre la mesure de l’importance du ressenti des élèves à l’égard de certains aspects de la vie de l’établissement et de leur impact sur leurs résultats scolaires. Le CNESCO s’est lui-même penché sur le sujet, en consacrant un rapport à la qualité de vie à l’école.
Ainsi, les travaux comparant la satisfaction scolaire à l’école et au collège s’accordent sur le fait que les écoliers ont une satisfaction scolaire plus élevée que les collégiens et que la satisfaction scolaire décroît au cours de la scolarité, du primaire au collège. En outre, au niveau de la classe, le bien-être des élèves est favorisé lorsque les enseignants encouragent la coopération entre les élèves et établissent avec eux des relations positives. De même, la collaboration entre les enseignants et les autres professionnels de l’école, ainsi que l’implication des parents dans les écoles, contribuent à favoriser le bien-être scolaire des enfants.
Par ailleurs, la notion de bien-être étant protéiforme, elle devrait faire, antérieurement à son évaluation, l’objet d’une réflexion approfondie par les instances scolaires qui associent les personnels, les élèves et leurs parents. Il s’agit :
– du conseil d’école qui, dans le cadre de l’élaboration du projet d’école, présente avis et suggestions sur toutes les questions intéressant la vie de l’école ;
– du comité d’éducation à la santé et à la citoyenneté (CESC), qui prépare le plan de prévention de la violence et définit un programme d’éducation à la santé et à la sexualité et de prévention des conduites à risques ;
– des conseils de la vie collégienne (CVC) ou pour la vie lycéenne (CVL) qui formulent des propositions sur le bien-être des élèves et le climat scolaire.
Pour faire suite aux constats relatifs aux lacunes en matière d’évaluation des personnels, nous proposons de :
? valoriser davantage les enseignants les plus investis dans leur métier :
– en complétant les trois « rendez-vous de carrière » par des évaluations intermédiaires ;
– en facilitant, pour les enseignants particulièrement investis, l’accès aux grades de la hors classe et de la classe exceptionnelle ;
– en permettant aux enseignants ayant conçu et mis en œuvre les bonnes pratiques de devenir des formateurs de leurs collègues, en contrepartie d’un service d’enseignement réduit
? faire de l’évaluation le pivot de la direction des établissements :
– en confiant aux directeurs des écoles publiques une mission de co-évaluation des enseignants (les directeurs des établissements privés exercent déjà cette tâche conjointement avec les inspecteurs) ;
– en évaluant les compétences professionnelles des directeurs d’école et des chefs d’établissement à partir de référentiels élaborés en concertation avec leurs représentants.
Pour être légitime et pertinente, l’évaluation de l’établissement devrait se référer aux ambitions de sa communauté éducative, combiner évaluation interne et externe et pouvoir déboucher sur l’adoption de mesures permettant d’améliorer les conditions d’apprentissage.
Il faut articuler autoévaluation et évaluation externe de tous les établissements au moins tous les cinq ans.
L’évaluation doit être centrée sur la mise en œuvre du projet d’école ou d’établissement. On rappellera que ce document est élaboré par l’ensemble des membres de la communauté éducative, adopté par le conseil d’école ou le conseil d’administration de l’EPLE et a une durée maximale de cinq ans.
Cette évaluation doit partir d’une autoévaluation interne pour impliquer et susciter l’adhésion de l’ensemble de la communauté éducative. Cette approche permettrait aussi de prendre en compte des données qualitatives sur le climat de l’établissement et les relations entre ses acteurs, ces éléments pouvant jouer un rôle déterminant sur la qualité des apprentissages et de la vie scolaire.
2. L’évaluation des établissements ne produira tous ses effets que si elle conjugue autoévaluation et évaluation externe.
Une évaluation en circuit fermée, réalisée par les seuls membres de la communauté éducative d’un établissement, s’exposerait au risque de la complaisance. Mais, pour être vraiment bénéfique pour les établissements, la combinaison évaluation interne/externe doit respecter les principes suivants :
– les évaluations, externe et interne, devraient être contextualisées et n’imputer à l’action de l’établissement que ce qui dépend réellement de lui ;
– elles devraient reposer sur des règles connues à l’avance, ce qui implique d’énoncer clairement aux acteurs locaux les objectifs de l’évaluation, sa méthodologie et l’utilisation qui en sera faite ;
– l’évaluation externe devrait être centrée sur les problématiques révélées par l’autoévaluation ;
– les équipes d’évaluateurs externes devraient être mixtes (inspecteurs, cadres académiques, « tiers de confiance » tels des enseignants ou directeurs d’autres établissements, en activité ou à la retraite, des personnels médico-sociaux, des parents d’élèves ou anciens élèves, des chercheurs spécialisés…).
L’ensemble de ces préalables serait de nature à faire de l’évaluation des établissements une démarche positive, acceptée par tous et bénéfique.
3. Toutes les facettes de l’établissement, y compris le bien-être des élèves et des enseignants, doivent être observées à cette occasion.
Pour être objective et utile, l’évaluation des établissements doit prendre en compte :
les résultats scolaires ;
le climat et la vie scolaire : plusieurs indicateurs peuvent témoigner de l’évolution du climat de l’établissement : le nombre de violences, d’incivilités, de retards, de sanctions disciplinaires, le degré de participation aux élections des délégués d’élèves, aux activités proposées dans le cadre des foyers socio-éducatifs des collèges et des lycées, etc. Le bien-être peut être évalué par la capacité de l’établissement à créer des conditions d’apprentissage sûres et sereines, au travers de l’attention portée à la gestion des locaux, à la restauration, aux activités périscolaires, aux emplois du temps… ;
les relations entre les différents acteurs, qu’il s’agisse des relations entre les enseignants, des relations entre les élèves et l’ensemble des personnels enseignants, d’éducation, de direction, administratifs, etc., des relations entre les personnels et les parents d’élèves et, plus largement, entre l’établissement et son environnement (associations, entreprises, collectivités locales) ;
la gouvernance, qu’il s’agisse des rapports entre la direction de l’établissement et les personnels, ou du mode de fonctionnement des instances décisionnelles ou consultatives. La capacité des uns et des autres à coopérer, à arbitrer et à faire vivre, par la qualité de leur dialogue, l’établissement devrait constituer une dimension à part entière de l’évaluation interne.
4. Enfin, il faut que les parties prenantes s’approprient les résultats de l’évaluation externe des établissements.
Pour faire de cette phase de l’évaluation une aide à l’amélioration des résultats de l’établissement, plusieurs conditions devaient être remplies :
– les conclusions de l’évaluation externe devraient être élaborées au terme d’un échange contradictoire avec l’établissement ;
– l’évaluation devrait donner lieu à un rapport transmis aux autorités académiques et à la communauté éducative de l’établissement, dans le cadre du conseil d’école ou d’administration. Nous considérons également que ce document devrait être rendu public ;
– ce rapport devrait aider l’établissement à engager des actions concrètes (accompagnement des équipes en termes de formation continue, de moyens ou d’actions spécifiques, de mise en œuvre d’une expérimentation pédagogique, etc.) ;
– les bonnes pratiques mises en exergue par les évaluations externes devraient être recensées et diffusées vers l’ensemble des établissements.
Le cadre de référence de cette politique pourrait être inscrit à l’article L. 241-4 du code de l’éducation.
Régis Juanico :
Au total, les objectifs de la fonction d’évaluation au sein de l’éducation nationale devraient être organisés autour de deux grands pôles, comme le montrent les schémas suivants :
Le premier pôle serait centré sur la mesure de la performance du système scolaire, cette catégorie d’outils rassemblant toutes les évaluations sur échantillons.
Le second pôle serait centré sur l’amélioration des pratiques pédagogiques et éducatives via le développement professionnel des personnels.
Ce pôle regrouperait :
les évaluations nationales standardisées,
les évaluations « ordinaires » en classe,
les évaluations des établissements.
Toutes ces évaluations devraient avoir pour finalité d’aider les adultes qui travaillent auprès des élèves à trouver les voies et moyens qui permettent d’améliorer les conditions d’apprentissage et le bien-être scolaire.
Dans la perspective de la mise en œuvre de ces propositions, nous proposons des évolutions relatives à l’organisation de l’administration centrale de l’éducation nationale.
La direction générale de l’enseignement scolaire et l’inspection générale de l’éducation nationale ne peuvent rester juges et parties :
La DGESCO est en effet à la fois le principal « prescripteur pédagogique » du ministère – elle élabore la politique éducative et pédagogique et assure la mise en œuvre des programmes d’enseignement – et l’évaluateur de plusieurs politiques nationales ou académiques. De même, l’IGEN évalue les méthodes pédagogiques, tout en participant au recrutement de certains personnels et en validant les sujets d’examen.
En outre, la dualité des inspections générales est une particularité française, que les ministres chargés de l’éducation nationale et de l’enseignement supérieur souhaitent faire disparaître.
Nous estimons, en conséquence, que la DGESCO ne devrait plus exercer de missions d’évaluation et que les deux inspections générales, l’IGEN et l’IGAENR, devraient fusionner pour créer un nouveau service, le « conseil général de l’enseignement et de la recherche » (CGER), ce qui impliquerait de modifier plusieurs dispositions du code de l’éducation, notamment les articles L. 241-1 à L. 241-3. Cette dénomination permettrait de ne plus employer un terme, inspection, qui se réfère trop au contrôle administratif, et soulignerait ainsi la mission d’accompagnement et d’évaluation des établissements scolaires, universitaires et de recherche.
La mission et les moyens du CNESCO doivent être confortés
Le Conseil national d’évaluation du système scolaire apparaît aujourd’hui comme une institution inachevée : s’il a su innover en matière de méthodologie, il ne dispose pas de moyens juridiques et budgétaires pour piloter la fonction d’évaluation au sein du ministère. Or nous défendons le principe d’une plus grande cohérence et d’une coordination renforcée des acteurs ministériels ayant un rôle en matière d’évaluation.
Nous proposons donc que le CNESCO :
– établisse un programme pluriannuel d’évaluation, qui s’impose à l’ensemble des acteurs chargés de cette mission (DEPP, inspections générales, services statistiques académiques), après l’avoir discuté en amont avec eux. Ce programme devrait être validé par le ministre de l’éducation nationale. Cette nouvelle compétence du CNESCO implique de modifier l’article L. 241-12 du code de l’éducation ;
– propose la répartition, entre les différentes entités compétentes de l’éducation nationale, des moyens alloués à l’évaluation ;
– soit consulté lors de l’élaboration de nouveaux outils d’évaluation (comme les tests standardisés par exemple) ou du lancement d’évaluations de dispositifs pédagogiques (comme le dédoublement des classes de CP par exemple), et aussi avant la publication des résultats, pour en certifier le respect des règles méthodologiques ;
– puisse mobiliser un réseau d’experts extérieurs au ministère de l’éducation nationale pour réaliser des évaluations indépendantes et puisse avoir accès aux données de la DEPP, dont les compétences statistiques doivent être préservées ;
– assure la diffusion des évaluations réalisées par le ministère.
Ses effectifs et ses moyens de fonctionnement devraient être par ailleurs augmentés et il devrait bénéficier d’un budget propre.
En conclusion, la fonction d’évaluation au sein de l’éducation nationale deviendrait, comme le montre le schéma que nous proposons, plus lisible, plus intelligible et permettrait une utilisation plus performante des différents acteurs chargés de cette politique.
Projet de Rapport-2709(1) by Pierrick Courbon on Scribd
Evaluations des élèves à plusieurs niveaux (CP, CE1, 6e, seconde), annonce de la création en 2019 d’une instance d’évaluation des établissements du secondaire… A cette rentrée, Jean-Michel Blanquer a insisté sur sa volonté « de développer une culture de l’évaluation positive ». Une ambition saluée par un rapport parlementaire intitulé Evaluer l’école pour la réussite de tous qui paraît ce jeudi. Pour 20 Minutes, ses auteurs, Marie Tamarelle-Verhaeghe (députée LREM de l’Eure) et Régis Juanico (député socialiste de la Loire) reviennent sur leurs propositions pour renforcer les évaluations dans le système éducatif.
Dépêche AFP by Régis Juanico on Scribd
Régis Juanico (apparenté socialiste) et Marie Tamarelle-Verhaeghe (LREM) remettent jeudi leur rapport sur “l’organisation de la fonction d’évaluation du système éducatif”. Leur conclusion : “L’Éducation nationale n’a pas une vision claire sur ce que les élèves apprennent et sur la façon dont ils apprennent.”
Deux parlementaires proposent de refonder la politique d’évaluation du système éducatif français dans un rapport publié jeudi, avec pour objectifs de renforcer et de mettre en cohérence les outils d’évaluation et d'”aider élèves et établissements à progresser”. Lire la suite …
Un rapport parlementaire, présenté jeudi 27 septembre, va dans le sens des initiatives prises par le ministre de l’éducation Jean-Michel Blanquer pour renforcer l’évaluation à tous les niveaux?: élèves, enseignants, établissements, système scolaire.
Deux députés, l’un de la majorité (Régis Juanico, socialistes et apparentés), l’autre de l’opposition (Marie Tamarelle, LREM), présentent aujourd’hui un rapport sur l’évaluation du système scolaire. Les profs sont-ils bons ? Les élèves progressent-ils ?
Marie Tamarelle-Verhaegue (LREM) et Régis Juanico (Nouvelle gauche) ont publié ce jeudi un rapport préconisant une refonte de la politique d’évaluation dans l’éducation nationale.
Un rapport parlementaire publié jeudi livre des pistes pour mettre en oeuvre la promesse d’Emmanuel Macron d’une évaluation renforcée des élèves, des enseignants et des établissements.
Dépêche AEF by Régis Juanico on Scribd
Evaluer l’école pour la réussite de tous : c’est sous ce titre que les députés Marie Tamarelle-Verhaeghe (LaREM) – sur la 3e circonscription de l’Eure – et Régis Juanico (Génération. s) ont rendu leur rapport parlementaire (le 27 septembre) sur la fonction d’évaluation du système éducatif, au nom du comité d’évaluation et de contrôle des politiques publiques (CEC). Lire la suite …
Communiqué by Régis Juanico on Scribd
Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.
Laisser un commentaire