Mercredi 13 juin, j’ai été l’invité de l’émission « Questions d’actualité » sur LCP, animée par Marion Becker, pour débattre face à Raphaël Schellenberger, député Les Républicains du Haut-Rhin.
Nous sommes revenus sur la situation dramatique que connait actuellement l’Aquarius, un bateau ambulance avec 629 migrants à son bord, que la France a décidé d’ignorer pendant quatre jours. Après être sorti de son silence assourdissant, et plutôt que d’envoyer un message humanitaire fort et clair, le Gouvernement a préféré se retrancher derrière des considérations technocratiques sur droit maritime. Déplorable ! J’ai également tenu à saluer l’humanité du Premier Ministre espagnol Pedro Sanchez, qui fait honneur à nos valeurs.
Nous avons aussi abordé la question des agrocarburants où j’ai précisé que selon mon point de vue, la production agricole devait avant tout servir à nourrir les Hommes plutôt qu’à fabriquer des carburants.
Marion Becker : Régis Juanico, on voit la réponse du premier Ministre sur ce choix de l’Italie par rapport à l’Aquarius. Le premier Ministre qui a précisé que la France elle ne se soustrairait pas à ses obligations si elle y était confrontée. C’est la réponse que vous attendiez sur cette question de l’Aquarius ?
Régis Juanico : Non, moi je suis vraiment frappé par le silence assourdissant des autorités françaises et d’Emanuel Macron bien évidemment. On n’a pas le droit de faire de la vie de migrants qui sont sur ce bateau, un enjeu politique ou politicien. Parce qu’on voit bien Mateo Salvini, si on avait encore quelques doutes sur les orientations de son gouvernement en Italie, là c’est une politique extrémiste à fond, à fond, à fond la caisse. Quand on revient sur l’enjeu qui est quand même qu’il y a eu 16 000 décès de migrants depuis 2014 en méditerranée. Là les européens ne sont pas à la hauteur des enjeux. Sauf Pedro Sanchez qu’il faut remercier, le premier ministre espagnol et Gilles Simeoni aussi pour l’Assemblée de Corse qui s’est exprimé. On aurait aimé que la France plutôt que d’être derrière des arguments technocratiques et bureaucratiques puisse exprimer quand même le fait qu’elle était prête à accueillir ce bateau si c’était nécessaire.
Marion Becker : On entend bien, c’est une question européenne. Qu’est-ce que vous attendez justement dans deux semaines du Conseil Européen à Bruxelles sur ces questions Régis Juanico ?
Régis Juanico : Beaucoup puisque l’Union Européenne c’est un discours qui en apparences est très généreux sauf que l’on voit bien que depuis des années on a laissé en premières lignes l’Italie et la Grèce. La Grèce même si c’est moins vrai maintenant puisque c’est que 30 000 personnes l’an dernier, c’est un million de migrants ; l’Italie 700 000 depuis 2013 ; l’Espagne 70 000 ; et la France quelques milliers. Le règlement aujourd’hui de Dublin doit être complétement revu. Aujourd’hui un petit groupe de pays, le groupe de Višegrad, dont d’ailleurs l’Italie dit vouloir se rapprocher pour faire capoter toute évolution mais ce qu’il faut effectivement, par rapport à ces pays ces pays de l’Est, c’est de tenir bon et d’avoir une répartition plus équilibré, plus homogène entre les pays, ça a échoué depuis 2015. Ils avaient prévu qu’il y ait 130 000 puis 100 000 relocalisations de migrants entre les pays pour mieux les répartir, il n’y en a eu que 30 000 en fait. On voit qu’il faut des règles plus harmonieuses.
Il y a des migrants qui fuient la guerre civile et la souffrance dans leur pays. Il y a 26 nationalités sur le bateau Aquarius. Dont certaines c’est le Soudan par exemple. Je veux dire qu’il faut aussi voir ce que sont ces situations.
Il faut dissocier les deux sujets (asile et immigration) après on ne sera pas d’accord effectivement sur les deux sujets avec Raphaël Schellenberger.
Marion Becker : On va poursuivre avec une autre polémique et cette colère des agriculteurs français qui dénoncent l’importation par total de 300 000 tonnes d’huile de palme pour sa raffinerie de la Mède. Ainsi, différents députés ont interpellé le gouvernement. Régis Juanico, c’était une erreur du gouvernement socialiste, un manque de cohérence entre environnement, protection de l’environnement et protection économique ?
Régis Juanico : Là on parle de 450 à 500 emplois industriels. Ceci dit moi je n’ai pas toujours été en accord avec les décisions de mon gouvernement sous la précédente majorité vous le savez bien. Je crois que là on touche du doigt une profonde contradiction. Quel que soit d’ailleurs les gouvernements. C’est-à-dire que l’on demande aux agriculteurs de monter en gamme d’avoir des produits de qualité et en même temps, c’est ce qu’il s’est passé pendant les états généraux de l’alimentation par exemple, et en même temps, on leur demande de continuer ou la France continue à importer des produits qui ne sont pas aux standards environnementaux ou sanitaires, comme l’huile de palme qui ont des effets désastreux sur l’environnement : la déforestation et puis aussi, tout simplement faire disparaitre la biodiversité. Donc on est dans une contradiction, mais moi je dis qu’il ne faut pas importer de l’huile de palme tout simplement et qu’il ne faut pas utiliser l’huile de palme dans la constitution d’agrocarburants. D’ailleurs je pense que les productions d’huile de colza ou de dérivés du blé il faut les utiliser aujourd’hui pour l’alimentation en priorité et pas pour faire de l’agrocarburant. On pense rouler proprement avec des agrocarburants mais avec des conditions sociales qui font qu’on exploite des populations à plusieurs milliers de kilomètres de chez nous. C’est ça la réalité.
Marion Becker : Agrocarburants et non pas biocarburants vous le rappelez. C’est la FNSEA qui a initié ce mouvement, la FNSEA qui défend le monopole notamment d’Avril, cette société qui fournissait Total. Une firme gérée par l’ex président de la FNSEA, Xavier BELIN, qui a aussi des intérêts finalement assez troubles.
Régis Juanico : Oui, Avril c’est 6 milliards de chiffres d’affaires, c’est 50% de la production de biodiésel en France et bien évidemment l’on ne peut pas s’empêcher de penser que la FNSEA est aussi en soutien d’intérêts vis-à-vis d’un concurrent de Total. Avril et donc là aussi, je répète, je pense que ce à quoi il faut parvenir c’est que la production agricole doit avant tout se concentrer sur l’alimentation plutôt que sur les agrocarburants où la production d’agrocarburants.
Marion Becker : Ce sera le mot de la fin. Je rappelle que Stéphane Travers le ministre de l’Agriculture recevait les organisations syndicales des agriculteurs à 15h à son ministère. Merci à vous.
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