A l’occasion de l’examen d’une proposition de résolution déposée par le groupe Modem à l’Assemblée nationale, relative à la question, large, de l’engagement associatif, je suis intervenu ce Jeudi 30 novembre, au nom de mon groupe, Nouvelle Gauche, pour aborder notamment le sujet des conséquences de la suppression des contrats aidés.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la vie associative, dans notre pays, est forte de l’engagement quotidien ou plus ponctuel de 16 millions de bénévoles dans un peu plus d’un million d’associations. Nous le devons à la loi du 1er juillet 1901, relative au contrat d’association, l’une des grandes lois fondatrices de la République, qui est plus que jamais d’actualité, puisqu’il se crée chaque jour en France, en 2017, 200 nouvelles associations.
L’engagement associatif est un atout considérable, mais aussi une spécificité que l’on nous envie dans toute l’Europe. Et, contrairement aux idées reçues, cette dynamique de l’engagement ne s’est pas démentie au cours des dernières années, puisque le nombre de bénévoles a augmenté de 17 % entre 2010 et 2016, et que cette augmentation a atteint 35 % chez les jeunes de moins de trente-cinq ans. Le service civique, qui voit ses moyens budgétaires confortés en 2018, y est pour beaucoup.
La vie associative est un joyau qu’il faut entretenir. Cette richesse, nous devons la préserver et la conforter, car elle est fragile. Si la grande majorité de ces associations – 85 % d’entre elles – se reposent sur l’action de leurs seuls bénévoles, ce qui représente tout de même l’équivalent de 680 000 équivalents temps plein, le secteur associatif est aussi très dynamique en matière de création d’emplois pérennes et non délocalisables, avec près de 2 millions de salariés. La moitié de ces associations employeuses compte un ou deux salariés.
Aujourd’hui, force est de constater que la confiance est abîmée, en particulier avec ces associations moyennes, dont l’activité repose certes sur un fort noyau de bénévoles, mais aussi, bien souvent, sur des contrats aidés – chacun de nous peut le constater dans son territoire. La pérennité des activités de ces associations sportives, culturelles, solidaires ou de ces centres sociaux, est menacée par la décision brutale du Gouvernement, prise sans concertation et sans solution de remplacement, de réduire le nombre de contrats aidés de 460 000 en 2016 à 200 000 en 2018 et de baisser simultanément le taux de prise en charge financière de l’État de 75 % à 50 % en moyenne.
Nous savons pourtant que, même s’ils ne sont pas la panacée, ces contrats aidés sont indispensables au fonctionnement de certaines associations, qui n’ont pas les moyens financiers de recruter des emplois traditionnels, trop coûteux. Chacun sait aussi que ces contrats aidés, contrairement à ce qu’on a pu entendre ces derniers mois, sont utiles socialement. Je pense en particulier aux emplois d’avenir, qui vont être supprimés. Chacun d’entre nous a dans sa circonscription un club sportif qui a recruté des emplois d’avenir, qui a formé des jeunes pendant trois ou quatre ans, leur assurant une formation réellement qualifiante. Après avoir passé leur brevet ou leur diplôme d’État, ils sont devenus éducateurs sportifs et ont vu leur emploi pérennisé – contrairement, là encore, à ce qu’on dit parfois – dans le même club ou dans un autre, ou au sein de la filière des métiers du sport, qui est particulièrement dynamique.
Nous savons aussi que nous allons assister, dans les prochaines semaines ou dans les prochains mois, à des fermetures de structures – ce mouvement a déjà commencé – et à des réductions d’activité ou de voilure dans certaines associations, ce qui implique une baisse des services rendus à la population et aux habitants de nos territoires.
Nous veillerons tout particulièrement, monsieur le ministre, à ce que les contrats aidés qui vont être supprimés dans la vie associative ne soient pas remplacés par des missions de service civique, car ces missions d’intérêt général qui assurent des services publics ne sont pas équivalentes au salariat. J’étais, il y a peu, dans une agence Pôle emploi, qui propose à la fois des contrats aidés et des missions de service civique et j’ai pu constater que la frontière entre les deux est parfois ténue et floue. Je pense, par exemple, au dispositif « Devoirs faits », pour lequel il faudra s’assurer qu’il n’y ait pas trop de confusions ou de substitutions entre les missions d’intérêt général des volontaires du service civique et les emplois traditionnels.
La proposition de résolution de notre collègue Sylvain Waserman identifie les bons leviers d’action pour mieux soutenir la vie associative et reconnaître l’engagement bénévole. La résolution reconnaît d’ailleurs, et j’en remercie son auteur, qu’un important travail a été réalisé depuis maintenant cinq ans, avec le soutien de l’ancienne majorité parlementaire. C’est un travail qu’il faut poursuivre.
Vous évoquez la logique de co-construction des politiques publiques avec le monde associatif, qui est effectivement fondamentale. Le service civique est un bon exemple de co-construction de politique publique réussie en faveur de l’engagement des jeunes et en soutien à la vie associative, puisque ces volontaires du service civique sont aujourd’hui, pour 80 % d’entre eux, dans des structures associatives.
La charte des engagements réciproques entre l’État et le mouvement associatif, signée en 2001, a été renouvelée en 2014 et élargie aux collectivités territoriales, autres partenaires incontournables des associations.
Il faut à présent faire vivre cette charte des engagements réciproques dans tous nos territoires. Elle encourage notamment le développement des contrats pluriannuels d’objectifs – CPO –, qui permettent de contractualiser avec les associations. À cet égard, je souscris à vos propos, monsieur Waserman : l’Assemblée nationale a un rôle important à jouer pour soutenir l’application de cette charte sur le terrain.
La simplification, que vous avez évoquée, est un élément fondamental pour la vie associative. Ainsi que je l’ai indiqué précédemment, le nombre de bénévoles augmente, et le principal problème concerne, nous le savons tous, les bénévoles responsables et ceux qui participent aux bureaux des associations, sur les épaules desquels repose toute la charge de travail et toutes les responsabilités, en particulier juridiques, inhérentes à leurs fonctions.
Nous avons commencé à progresser, certes trop lentement peut-être, en matière de simplification. Le dossier unique de subvention est aujourd’hui une réalité, et j’espère que ce dispositif se déploie désormais sur tout le territoire. La dématérialisation des démarches administratives et le principe « dites-le nous une seule fois » représentent un gain de temps très important pour les associations. Grâce au vote, l’an dernier, d’un amendement à la loi de modernisation de notre système de santé, que j’avais défendu notamment avec Valérie Fourneyron, le certificat médical de non-contre-indication à la pratique sportive est désormais valable trois ans, alors qu’il fallait auparavant le renouveler chaque année. C’est un point très important.
Cette mesure, en application depuis cet été, simplifie considérablement les choses pour les bénévoles, pour qui cela représentait une charge de travail, mais aussi pour les familles, pour qui cela constituait une contrainte.
S’agissant de la reconnaissance de l’engagement associatif et du bénévolat, je pense au congé d’engagement associatif, qui permet désormais à tous les salariés de bénéficier de six jours de congé par an, éventuellement rémunérés s’il y a un accord d’entreprise en ce sens. Je pense aussi au compte d’engagement citoyen, qui ouvre des droits à formation de vingt heures aux personnes qui consacrent 200 heures à une association, et à la validation des acquis de l’expérience, qui permet elle aussi une meilleure reconnaissance.
La sécurisation financière et juridique, que vous avez également évoquée, est fondamentale. La loi relative à l’économie sociale et solidaire, dite « loi Hamon », a permis de sanctuariser la définition de la subvention, mais aussi d’inscrire dans la loi le dispositif local d’accompagnement, qui permet d’accompagner 40 000 associations dans leurs projets dans nos territoires. C’est une avancée positive. Néanmoins, il faudra aller plus loin, en particulier sur le plan financier. Nous avions voté, en 2012, un abattement sur la taxe sur les salaires en faveur des associations, pouvant aller jusqu’à 20 000 euros, puis le crédit d’impôt sur la taxe sur les salaires, le CITS. Son taux, de 4 %, n’est pas encore tout à fait équivalent au taux de 6 % dont bénéficient les entreprises au titre du CICE – crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi. Il faudra évidemment qu’il y ait une convergence de ces deux dispositifs de soutien financier.
Je n’aurai pas le temps de développer mon propos concernant l’axe éducatif, qui me tient particulièrement à cœur, de même qu’à vous, monsieur le ministre. Nous avons déjà eu l’occasion d’évoquer l’engagement citoyen dès le plus jeune âge. Il faudra que vous teniez bon sur le livret citoyen, afin que nous puissions le décerner aux élèves de troisième, à seize ans.
En tout cas, vous identifiez les bons leviers d’action, chers collègues du Mouvement démocrate et apparentés. Je regrette simplement qu’une grande majorité d’entre vous aient voté, il y a quelques semaines, la suppression d’un grand nombre de contrats aidés. Donc, nous ne pouvons pas cautionner totalement votre proposition de résolution, même si nous ne voterons pas contre.
Si vous souhaitez de plus amples informations concernant les contrats aidés, je serai l’animateur d’un forum sur les contrats aidés, à Saint-Etienne.
Ce forum se déroulera le jeudi 7 décembre à partir de 18h30 à l’Université Jean Monnet de Saint-Étienne (amphithéâtre KR 1, site Tréfilerie).
Toutes les informations complémentaires ici.
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