Je suis intervenu au nom du Groupe Nouvelle Gauche, ce jeudi 1er février, en séance publique à l’occasion de l’examen de la proposition de loi portée par mon collègue François Ruffin (FI) et faire des propositions d’amélioration pour une meilleure reconnaissance du syndrome d’épuisement professionnel.
Malheureusement, la majorité LREM a adopté une motion de rejet préalable, qui a immédiatement éteindre le débat et empêché l’examen des amendements des différents groupes. J’ai exprimé, au nom de mon groupe, notre opposition à cette mesure vexatoire et injustifiable. Des salarié.e.s de LIDL, dont un des collègues avait été retrouvé pendu sur son lieu de travail, avaient fait le déplacement pour assister à nos échanges. Je regrette qu’ils aient été le témoin de ce bottage en touche de la part de la majorité parlementaire.
Le débat doit se poursuivre. C’est pourquoi, dans la continuité du texte de la France Insoumise, le groupe Nouvelle Gauche déposera prochainement une nouvelle proposition de loi afin d’expérimenter l’abaissement du taux d’incapacité permanente partielle de 25 à 10 %.
Selon une étude du cabinet Technologia, réalisée en 2014, trois millions d’actifs, soit 12 % de la population active, seraient en risque élevé de burn-out.
Le syndrome d’épuisement professionnel, ensemble des troubles psychiques que subissent les travailleurs confrontés à un environnement professionnel délétère, touche tous les secteurs d’activité, privé comme public.
Le syndrome d’épuisement professionnel caractérisé par un sur-engagement au travail puis par un effondrement, touche les personnels de santé mais aussi les forces de sécurité : les mobilisations récentes dans la Police Nationale, les EHPAD ou les hôpitaux publics en sont la démonstration. Il touche indistinctement les ouvriers, les cadres, les agriculteurs, les médecins, les enseignants, les dirigeants de PME, les artisans, les employés, les salariés de LIDL présents dans les tribunes que je salue.
Les facteurs de risque du burn-out sont connus et identifiés dans de nombreux rapports scientifiques : certains modes de management et d’organisation du travail, la pression, la mise en concurrence des salariés, l’isolement, la surcharge de travail, le manque de reconnaissance professionnelle ou l’effacement de la frontière entre vie professionnelle et privée… Les symptômes du Burn-Out sont bien connus aussi : anxiété, troubles du sommeil ou digestif chroniques, fatigues, hypertension.
La question du syndrome de l’épuisement professionnel, du burn-out, n’est pas nouvelle.
A la fin des années 2000, les crises suicidaires à France Télécom et à Renault ont abouti à une prise de conscience. Nous sommes un certain nombre ici, à avoir travaillé depuis de longues années sur ce sujet, y compris la Ministre Murielle Penicaud, qui je le regrette n’a pas jugé utile d’être présente à l’Assemblée Nationale, ce matin.
L’Assemblée nationale et, en son sein la commission des affaires sociales, a toujours été à la pointe du combat en faveur d’une meilleure reconnaissance du burn-out.
En 2011, avec la constitution d’une mission d’information sur les risques psychosociaux, aux travaux desquels nous avons participé avec Francis Vercamer, sous la présidence de Marisol Touraine.
Puis, en 2014, trente députés signent l’appel des 10 000 avec des syndicalistes, un collectif de médecines du travail et des spécialistes des questions de santé de travail tels Jean-Claude Delgènes, pour une meilleure reconnaissance du burn out.
En août 2015, une première étape législative est franchie avec l’adoption de la loi sur le dialogue social et l’emploi. Nous avons alors inscrit pour la première fois dans la loi que les « pathologies psychiques peuvent être reconnues comme des maladies d’origine professionnelle. »
En février 2016, le groupe socialiste dépose une première proposition de loi, à l’initiative de Benoit Hamon, pour une meilleure reconnaissance du burn-out. Enfin, en février 2017, notre ancien collègue Gérard Sebaoun, au nom d’une mission parlementaire de la commission des affaires sociales présidée par Yves Censi, sur le syndrome d’épuisement professionnel, présente les conclusions de son rapport adoptées à l’unanimité.
Le groupe Nouvelle Gauche est favorable à toutes les initiatives parlementaires visant à faciliter la reconnaissance du syndrome d’épuisement professionnel en tant que maladie professionnelle.
Et je veux remercier le groupe France Insoumise, nos collègues François Ruffin et Adrien Quatennens, d’avoir inscrit à l’ordre du jour de nos débats cette proposition de loi dont nous partageons les objectifs.
Pour autant, si nous partageons les objectifs, nous avons une différence sur les modalités pour parvenir à une meilleure reconnaissance du burn out. La proposition de loi prévoit l’inscription dans la loi d’un nouveau tableau de maladies professionnelles qui semble très difficile à faire aboutir dans l’immédiat.
À ce jour, seul le Danemark a inscrit, en 2005, l’etat de stress post-traumatique dans son tableau de maladies professionnelles, même si dans notre pays, il faut souligner que d’autres pathologies multi-factorielles ont déjà été intégrées, par exemple, le cancer du poumon dû à l’exposition à l’amiante.
Outre que ces dispositions relèvent du pouvoir réglementaire, l’évolution des tableaux dépend d’une discussion entre l’administration et une commission spécialisée dans les pathologies professionnelles au sein du Conseil d’Orientation des Conditions de Travail. Elle nécessite un accord entre partenaires sociaux. Or, nous savons que le patronat n’y est pas favorable.
Pour avancer concrètement et plus rapidement, nous proposons pour notre part de modifier la procédure de reconnaissance complémentaire, hors tableau. La procédure complémentaire permet à des salariés de déposer des dossiers de reconnaissance devant les Comités Régionaux de Reconnaissance des Maladies Professionnelles mais nous considérons que ces derniers appliquent des critères trop restrictifs. La grande majorité des dossiers ne sont même pas examinés et sont écartés d’office.
Les CRRMP demandent au salarié d’avoir un taux d’Incapacité Partielle Permanente de 25 %, ce qui est considérable : les maladies psychiques ne peuvent pas entrer dans ce cadre. Les comités acceptent 600 dossiers par an alors que 20 000 cas sont diagnostiqués en Belgique.
Du coup, quelque 10 000 cas de burn out sont reconnus, de façon détournée, comme accidents du travail. Conséquence, le burn-out entraine des arrêts-maladie classiques pris en charge financièrement par l’assurance maladie financée par tous, alors qu’il devrait être indemnisé par la branche AT-MP, financée par les cotisations des employeurs ce qui serait un moyen de les responsabiliser et de les inciter à une meilleure prévention.
Le traitement des dossiers et leur conditions de recevabilité varient en fonction des . Le CRRMP d’Île-de-France indique qu’il rejette la moitié des dossiers de reconnaissance pour affection psychiatrique qui lui sont soumis, car le taux d’IPP est inférieur au seuil réglementaire. Dans l’un de ses rapports, la commission évaluant le coût réel pour la branche maladie de la sous-déclaration des accidents du travail et des maladies professionnelles dresse, le constat d’une forte disparité de traitement entre les caisses dans leur pratique de reconnaissance et de fixation de ce taux d’IPP.
Nous proposons d’expérimenter l’abaissement du seuil de 25 % d’incapacité permanente, à 10 %.
Pourquoi 10% ? Les cas de dépression et d’épuisement professionnel donnent lieu à des taux d’IPP qui se situent entre 12 % et 15 %, la majorité des dossiers de troubles psychiques pourraient être déclarés recevables et être examinés. Précisons qu’en Suède le seuil a été purement et simplement supprimé.
Ce matin, les mots « complexité », « interaction », « multifactoriel » ont souvent été prononcés, le Ministre Castaner a évoqué des « contours mouvants » signe d’une certaine frilosité, encore, dans certains de nos rangs notamment de la majorité. Ce sont ces mots mêmes avec le terme « usines à gaz » qu’utilisait une organisation patronale opposée, pour des raisons idéologiques, à la reconnaissance de la pénibilité au travail. Résultat : le compte de prévention et de pénibilité est aujourd’hui fortement dégradé, en particulier pour le risque chimique. Il me semble bon de le rappeler.
Nous souhaitons que les futurs travaux parlementaires puissent aboutir dans les plus brefs délais à des avancées concrètes, prenant appui sur tout ce qui a été fait depuis près de huit ans grâce au travail commun de la majorité et de l’opposition, à l’instar de l’amendement défendu par Dino Cinieri et Stéphane Viry, adopté à l’unanimité en commission reprenant une proposition du rapport Sebaoun sur l’évaluation du coût social du syndrome d’épuisement professionnel.
Dans la continuité de ce rapport, nous souhaitons, plus largement, repenser la prévention des Risques Psycho-Sociaux dans une politique plus vaste de promotion de la Qualité de vie au travail. Les Risques Psycho-Sociaux devraient faire l’objet d’une obligation annuelle de négociation dans l’entreprise, dans le cadre des négociations collectives relatives à l’égalité femmes-hommes et de la qualité de vie au travail.
Le législateur finit par avoir beaucoup de retard sur la société. Dans quelques mois, des centres de prise en charge de patients atteints de burn-out vont ouvrir dans certaines villes, notamment à Villeurbanne. Les patients seront pris en charge à la journée avec l’accord et le financement de l’Agence régionale de santé (ARS), alors que les pathologies psychiques sont très peu reconnues dans notre système qui est devenu complètement inadapté et malthusien.
Le débat doit se poursuivre. C’est pourquoi, dans la continuité du texte de la France Insoumise, le groupe Nouvelle Gauche déposera prochainement une nouvelle proposition de loi afin d’expérimenter l’abaissement du taux d’incapacité permanente partielle de 25 % à 10 %.
Notre groupe s’opposera à la Motion de rejet préalable présentée par le groupe de la République en Marche, mesure vexatoire et injustifiable, qui aura pour conséquence d’éteindre immédiatement le débat et d’empêcher l’examen des amendements des différents groupes.
L’Assemblée a rejeté jeudi la proposition de loi de La France insoumise pour la reconnaissance comme maladies professionnelles de pathologies psychiques liées au burn out, via une motion préalable adoptée par 86 voix contre 34 et coupant court au débat sur les articles et amendements.
A la suite du groupe France insoumise, c’est le député socialiste stéphanois, Régis Juanico, qui a déposé une proposition de loi pour le reconnaissance de nouvelles maladies professionnelles liées à l’épuisement. Le député a signé un long texte sur ce thème dans le quotidien Libération. Par ailleurs, il vient d’intégrer la commission d’enquête de l’Assemblée national sur les maladies et pathologies professionnelles dans le milieu industriel. Sur un autre registre, le député vient de se prononcer sur un allongement du congé de paternité, de 11 jours à 4 semaines.
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Bravo et merci M. Juanico !
Dans les entreprises et dans le secteur public, il y a vraiment des problèmes de management et une véritable souffrance au travail.
Le taux de 25 % d’IPP est inatteignable et sa révision à la baisse serait essentielle.