L’Essor a consacré dans son édition du vendredi 13 mai un dossier au syndrome d’épuisement professionnel, dit “burn-out”. C’est dans ce cadre que j’ai répondu aux questions de l’hebdomadaire sur le travail que nous menons avec plusieurs de mes collègues parlementaires pour faire reconnaître le burn-out comme maladie professionnelle.
Le burn-out reconnu comme une maladie professionnelle ? Cela pourrait être bientôt le cas. De nombreux parlementaires, comme le député ligérien (PS) Régis Juanico, se sont en effet emparés de la question pour que les salariés souffrant d’épuisement au travail puissent en bénéficier et être mieux protégés.
Le bien-être au travail, le député socialiste Régis Juanico s’y est intéressé il y a déjà plusieurs années. Le parlementaire ligérien a notamment participé en 2008 et 2011 à l’élaboration de deux rapports sur les risques psychosociaux au travail.
Après que la pénibilité ait été prise en compte lors de la loi retraite de 2013, de nombre députés ont souhaité se pencher sur la question de la reconnaissance du burn-out. À l’initiative du cabinet d’études Technologia (voir par ailleurs) spécialisé dans la prévention des risques liés au travail, un premier appel a été fait en janvier 2014 et a rassemblé plus de 10 000 signataires. En décembre 2014, les députés ont souhaité à leur tour envoyer un signal d’alarme avec le soutien d’un collectif de médecins du travail. Différents rapports parlementaires ont alors vu le jour tant du côté de l’Assemblée nationale que du Sénat.
“Nous souhaitions qu’il y ait des améliorations législatives pour mieux reconnaître le syndrome d’épuisement professionnel. Les règles sont drastiques. Soit vous vous situez dans le tableau des maladies professionnelles, soit il faut passer par le comité régional des maladies professionnelles (CRRMP). Dans ce dernier cas, très peu de dossiers aboutissent.” Engager une telle procédure pour un salarié nécessite de justifier un taux minimum d’incapacité permanente partielle (IPP) de 25%, un seuil qui élimine dès lors le cas d’épuisement au travail.
L’un des premiers enjeux de cette reconnaissance est la prise en charge financière par les employeurs puisque actuellement cela repose exclusivement sur la Sécurité sociale. “On estime que l’épuisement professionnel coûte chaque année à la branche d’Assurance maladie environ 4,5 Md€. Nous aurions tout intérêt à faire reposer ce financement sur la branche accident du travail/maladie professionnelle qui, elle, est financée à 97% par les employeurs et qui est aujourd’hui excédentaire d’environ 600 M€, alors que la branche maladie est en déficit de 7 Md€, explique le député socialiste. Si on encourageait aujourd’hui les employeurs à être beaucoup plus responsabilisés sur le plan financier, on ferait de la prévention. Pour le moment, les entreprises se défaussent sur le régime général.”
En 2015, un premier texte a été proposé au sein du projet de loi Rebsamen sur le dialogue social et l’emploi où deux amendements ont été adoptés : le premier pour disposer d’un rapport du gouvernement d’ici le 1er juin 2016 afin de savoir comment l’intégration du burn-out dans le tableau des maladies professionnelles peut être facilité ainsi que l’abaissement du taux d’IPP ; le deuxième pour que les pathologies psychiques puissent être reconnues d’origine professionnelle dans le cadre des modalités des CRRMP. “Notre volonté n’est pas que tous les dossiers soient acceptés mais qu’ils soient tous traités”.
Le 16 février dernier, une proposition de loi a été présentée à l’Assemblée nationale et signée par 84 députés. Dans le même temps, une lettre a été envoyée à la ministre du Travail, Myriam El Khomri. “On est bloqué en tant que parlementaires puisque nous avons l’interdiction de formuler des amendements aggravant une charge publique. Nous avons demandé à la ministre de pouvoir obtenir un abaissement du seuil d’IPP car seul le gouvernement peut déposer cet amendement. A l’heure actuelle, nous n’avons pas eu de réponse.”
Sur la question de l’augmentation de la fraude que redoutent notamment les employeurs si le burn-out est reconnu comme maladie professionnelle, Régis Juanico n’a pas d’inquiétudes. “Je ne crains pas du tout les questions de fraude car on travaille avec des spécialistes de la santé au travail, des médecins… Certes on va dans le sens d’un assouplissement des critères mais la barre est aujourd’hui tellement haute que c’est véritablement un parcours du combattant. Si on la possibilité d’obtenir enfin une définition de ces troubles ce serait déjà une très grande avancée car cela permettrait de mieux cerner et mieux traiter l’épuisement professionnel. Malgré tout cela risque de demander un certain temps.
Dossier spécial “Burn-out, le mal du travail” dans l’Essor du 13 mai 2016
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