Il y a, sur le sujet de la crise sanitaire, les débats interdits : les Français disposeront-ils de masques pour le déconfinement ? Qui les distribuera ? Y aura-t-il assez de tests ? Des hôtels ont-ils été réquisitionnés pour isoler les porteurs du virus? Comment nos enfants seront-ils protégés lors de leur retour à l’école ?
Et il y a les débats de diversion sur lesquels le gouvernement braque les projecteurs pour renvoyer au second plan les débats interdits sur les masques et les tests. Ainsi en va-t-il du “débat” sur l’application de traçage numérique « Stop Covid-19 ».
Le débat aura lieu alors que l’application ne sera pas encore disponible… et qu’aucun de ses promoteurs n’est capable d’en démontrer l’efficacité.
Chacun peut comprendre qu’indépendamment du sujet de principe, cette application n’atteindra jamais le seuil nécessaire sur une base volontaire. Des opérations de traçage ont déjà été expérimentées dans d’autres pays, aucune n’a pour l’instant fait la preuve de son efficacité. Ainsi, Singapour qui l’a utilisée a dû revenir au confinement.
Nous souhaitons rappeler notre attachement à la protection des libertés individuelles qui s’inscrit dans le sens des textes de l’Union européenne.
Nous sommes ainsi opposés au développement d’une société de surveillance bio-technologique. Rien ne pourra garantir un anonymat véritable, ni l’absence de détournement de la technologie.
Les enquêtes d’opinion montrent avec constance qu’une majorité de Français n’est pas prête à se soumettre à ce dispositif intrusif.
Nous ne voulons pas que le virus soit l’occasion de mordre sur les principes même de notre démocratie et de nos libertés individuelles et collectives.
Enfin, nous soulignons que le consentement libre et éclairé, prérequis fondamental à l’utilisation d’une telle technologie, ne pourrait être garanti si cette application était mise en œuvre.
Les salariés pourraient, par exemple, être soumis à des contraintes, explicites ou implicites de la part de leurs employeurs ou de leurs collègues, pour installer l’application en contrepartie d’une reprise de l’activité.
Ce débat tronqué ne peut nous satisfaire, c’est pourquoi nous voterons et appelons à voter contre cette proposition du gouvernement au Parlement.
Initialement, le gouvernement avait prévu un débat à l’Assemblée Nationale puis au Sénat sans vote… Suite à notre courrier au Premier Ministre (voir ci-dessous) pour obtenir un vote solennel sur le « tracing », celui-ci aura bien lieu à l’issue du débat dans l’hémicycle mardi 28 avril, comme vient de nous le confirmer le Président de l’Assemblée Nationale Richard Ferrand (voir ci-dessous). Ce n’est pas un point de détail, car le vote, c’est ce qui distingue le débat parlementaire de la causerie, du colloque.
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EDIT 28 avril : Lors de la présentation de son “plan de déconfinement” le 28 avril, le Premier Ministre a reporté à une date ultérieure le débat et le vote portant précisément sur cette application.
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Intervention d’Hervé Saulignac, député de l’Ardèche, au sujet du tracing :
Notre courrier au Premier Ministre :
Monsieur le Premier Ministre,
Le Président de la République a évoqué lors de son allocution télévisée du 13 avril l’éventualité d’avoir recours, dans le cadre du processus de déconfinement, à une application pour smartphone destinée à retracer les contacts avec des personnes contaminées par le Covid 19.
De telles applications ont été utilisées dans différents pays depuis le début de cette pandémie et ce, dans des conditions très disparates en matière de respect des libertés fondamentales. L’utilisation des nouvelles technologies dans le cadre de la lutte contre cette épidémie soulève en effet bien des questions éthiques et juridiques. Les interrogations à ce stade sont également techniques.
Bien que le Secrétaire d’Etat, M. Cédric O, ait assuré lors de son audition par la Commission des lois de l’Assemblée nationale que le recours à une telle application devrait au préalable respecter le droit en vigueur au niveau national et européen.
Il n’en demeure pas moins que de nombreuses interrogations restent en suspens : l’efficacité de cette application n’est-elle pas d’ores et déjà compromise alors que de nombreuses personnes, notamment les plus âgées, ne maitrisent pas suffisamment les outils numériques ou n’y ont tout simplement pas accès faute de moyens ?
Dès lors qu’une telle application ne peut être efficace qu’au-delà d’un certain seuil d’utilisateurs (entre 60 et 70% de la population), son efficacité n’est-elle pas dès à présent sujette à caution ?
Si la technologie du bluetooth est utilisée, les données seront-elles néanmoins centralisées et quels seraient à cet égard les risques de piratage ou d’utilisation non autorisée de ces données ?
D’autre part, si un utilisateur de cette application se voyait signifier qu’il est entré en contact avec une personne contaminée, cela ouvrirait-il le droit à bénéficier d’un test, au risque de porter atteinte au caractère facultatif de cette technologie ?
Enfin, faute de tests réalisés de manière massive, cette application ne risque-t-elle pas d’être contre-productive en offrant l’illusion d’une sécurité sanitaire à ses utilisateurs ?
Afin que le débat prévu à l’Assemblée nationale le 28 avril puisse véritablement apporter un éclairage à la Représentation nationale, les membres du groupe socialistes et apparentés, demandent par la présente au Gouvernement de :
– publier le code source de cette application et des programmes connexes, singulièrement ceux ayant trait au traitement centralisé des données personnelles ;
– communiquer aux parlementaires le descriptif complet de l’application que le Gouvernement envisage d’utiliser ainsi que les mesures connexes prises dans le cadre du déconfinement (tests, traitements différenciés des personnes selon leur âges, accès des personnes les plus fragiles aux nouvelles technologies …) ;
– proposer une solution alternative pour les personnes éloignées du numérique ;
– saisir la CNIL afin que cette autorité puisse rendre un avis, avant le 28 avril, sur le dispositif que le Gouvernement entend mettre en débat ;
– saisir également la Commission nationale consultative des droits de l’Homme afin que cette autorité puisse émettre un avis avant le débat prévu le 28 avril ;
– organiser dans ces conditions un débat à l’Assemblée nationale, suivi d’un vote, ainsi que le permet l’article 50-1 de notre Constitution, afin que nos concitoyens soient justement informés de la position adoptée par la Représentation nationale sur un sujet qui les concerne au premier chef.
Dans l’attente de votre réponse, et vous remerciant de l’attention portée à cette lettre, nous vous prions d’agréer, Monsieur le Premier ministre, l’expression de notre haute considération.
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Nous avons par ailleurs questionné le Premier Ministre au moyen d’un second courrier portant sur des questions purement techniques relatives à l’application :
2020-500 Courrier Au PM App… by Pierrick Courbon on Scribd
La réponse du Président de l’Assemblée nationale sur la question du vote :
Le “traçage numérique” face à l’épidémie Covid-19 : entre santé publique et vie privée – note d’information des Députés Socialistes et Apparentés
Le trac?age nume?rique face à… by RJ on Scribd
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je suis d’accord : des masques et des tests d’abord. C’aurait dû être la première priorité dès le premier jour où l’on savait.
Pour vous ce sera NON :
vous avez raison !
Je ne suis pas d’accord pour télécharger cette application sur mon téléphone pour plusieurs raisons.
En effet, selon moi, c’est une profonde atteinte aux libertés individuelles que d’être “fliqué” partout où l’on va.
D’autre part, si je suis en contact avec quelqu’un de Covid +, que se passe-t-il ? Je suis mise en “quinzaine” en attendant de voir si je suis malade ? Je devrais me faire dépister ? Je vais déclencher une enquête pour savoir qui j’ai pu rencontrer et potentiellement contaminer ? Qui va gérer toutes ces rencontres virtuelles ? Et que devient ma vie privée ?
De plus, je pense qu’au sein de la population, cela risque de générer de l’amertume, je ne crois pas de la haine, vis à vis des personnes transmetteuses de la pandémie dans les cas extrêmes.
Je pense sincèrement qu’il faut faire appel au civisme et à la responsabilité de chacun pour se protéger individuellement et collectivement mais pour cela, le gouvernement doit mettre à la disposition de l’ensemble de la population de notre pays, les moyens nécessaires de protection car seuls les moyens de distanciation sociale et les masques “maisons” ne suffiront pas.
Tout à fait d’accord ; on ne sait toujours pas quand nous disposerons de masques
même pour les personnes fragiles et on nous parle presque d’obligation de masque lors du 11 mai prochain.
Par contre pour nous tracer numériquement, cela leur semble important.
Il y a d’autres priorités
Janine
Les Allemands sont arrivé à maitriser la situation sans application! Faisons simple!