Malgré le confinement, il faut bouger. Le professeur Jean-François Toussaint, directeur de l’Institut de recherche biomédicale et d’épidémiologie du sport (Irmes), travaille depuis de nombreuses années sur les questions d’activité physique et de santé publique dont il est l’un des plus grands spécialistes.
Voici ce qu’il dit dans un entretien au Parisien le 9 avril 2020.
Faire du sport peut-il nous éviter d’attraper le coronavirus ?
Non, cela vous aidera simplement à mieux résister. Cette conclusion est issue de travaux qui montrent un taux et une vitesse de récupération beaucoup plus rapides sur la plupart des maladies infectieuses virales, lorsqu’on est actif ou sportif. Rester actif stimule le système immunitaire.
C’est le seul traitement dont on bénéficie actuellement contre le coronavirus. Il est important de maintenir nos défenses personnelles au plus haut niveau. Cela passe par une activité régulière, une bonne nutrition, ne pas fumer et ne pas boire trop d’alcool.
Etre en forme physique permettrait d’éviter les formes les plus graves ?
C’est ce qu’on peut imaginer. Ceux qui ont les formes les plus graves et décèdent sont ceux qui ont le plus de facteurs de risques. L’âge en est un, mais il n’est pas le seul. Si vous êtes plus jeune, des comorbidités (NDLR : d’autres maladies), un système vasculaire un peu dégradé, parce qu’on ne l’entretient pas assez ou qu’on lui porte atteinte par le tabac, donnent une surmortalité très importante.
Lorsqu’on est en surpoids, on se défend beaucoup moins bien. La sédentarité est un surrisque majeur. On a d’autres facteurs plus médicaux tels que l’hypertension artérielle ou le diabète qui rejoignent souvent un surpoids ou une inactivité physique majeure.
N’est-il pas trop tard pour s’y mettre ?
Des bénéfices apparaissent de façon très nette dès deux à trois semaines. Il n’y a pas de délai, il faut y aller ! On se donne des armes contre le virus en reprenant une activité régulière. On peut le faire chez soi, avec des exercices simples, sans aller jusqu’à l’épuisement, avec un petit nombre de répétitions de gestes et une progressivité : abdominaux, dorsaux, gainage, pompes, tractions si on a une barre, se baisser et se relever, trouver l’équilibre.
Que pensez-vous de l’interdiction des sorties sportives entre 10 heures et 19 heures ?
Ces restrictions n’ont pas de sens car si c’était aussi dangereux, l’interdiction serait totale. Quelqu’un qui court seul et reste à distance des autres n’a aucun risque de contamination.La mesure barrière, ce n’est pas de rester enfermé chez soi deux mois de suite. On a autant besoin d’aller chercher de l’énergie pour se nourrir que de la dépenser, pour être dans une condition optimale. Au déconfinement, l’immunité collective passera par des gens qui savent se défendre contre le virus.
Peut-on continuer de faire du sport si on est atteint du coronavirus ?
Si on suspecte une infection, il faut surveiller sa température. Si on a de la fièvre, il ne faut pas faire de sport. Si cela passe et qu’on a peu de symptômes, on se donne quatorze jours pour récupérer. Si on a une fièvre et une fatigue importantes, avec un essoufflement, il faut consulter.
Est-ce que c’est bon pour le mental ?
Dans nos études, ce mieux-être est décrit par tout le monde. Les actifs seront peut-être plus en capacité de résilience dans les semaines à venir. Il y aura des événements difficiles, des pertes d’anciens, des gens qui vont partir à cause de cette maladie.
Le contexte social et économique sera délicat. Il faut se donner des capacités pour faire face. C’est un des bénéfices majeurs, décrits au bout de trois semaines de pratique sportive. On enclenche des circuits hormonaux et la production de neurotransmetteurs qui permettent de mieux se sentir et de mieux se débrouiller dans une telle situation.
Interdire une activité physique individuelle de type course à pied ou marche rapide… à Saint-Etienne de 9h à 21h, c’est tout simplement ridicule et participe au concours Lépine de certains maires produit des arrêtés municipaux aussi improductifs qu’inefficaces.
Nous sommes la seule ville en France, avec Paris, où ce type d’arrêté est encore en vigueur… Nous n’avons pas à imiter Paris, où tout le monde peut constater les effets contreproductifs d’une telle mesure en concentrant les sorties simultanées et le nombre de coureurs qui se croisent avant 10h et après 19h !
Et pourtant, l’arrêté municipal à Saint-Etienne (175000 habitants) est encore plus restrictif qu’à Paris (2 millions d’habitants) en limitant une activité physique individuelle (course, marche…) avant 9h et après 21h. Cette mesure est clairement disproportionnée et inadaptée.
Ce qui compte, c’est l’application des règles de distanciation sociale et les gestes barrières pour ceux qui souhaiteraient pratiquer une activité physique individuelle.
À l’appui de sa décision, le maire de Saint-Etienne invoque la consultation d’une « commission scientifique et médicale spéciale Covid-19 » :
– peut-il être plus précis sur les spécialistes qu’il a consulté, les avis qui auraient été publiés par cette commission sur la question de l’activité physique individuelle en période de confinement sachant que cette commission ne se prononce que sur la gestion et le suivi de la crise sanitaire au sein du CHU ?
– quel est l’efficacité d’une telle mesure qui n’est appliquée qu’à Saint-Etienne intra-muros et n’est donc pas appliquée dans les communes périphériques, dans le reste du département de la Loire et encore moins dans les autres villes du pays ?
– pourquoi remettre en cause au bout de plus de trois semaines d’application l’un des sept motifs officiels de déplacement dérogatoire du décret du 23 mars 2020 qui définit des mesures générales s’appliquant partout sur notre territoire ?
Pourquoi pénaliser les personnes atteintes d’une maladie chronique (pathologies cardio-vasculaires, obésité, hypertension) qui se sont vues prescrire par un médecin une activité physique adaptée sur ordonnance et qui aujourd’hui sont empêchées de se soigner ?Il est bien précisé dans les formulaires d’attestation dérogatoire que « l’activité physique collective est prohibée ainsi que toute proximité avec d’autres personnes ». Tout le monde peut constater à Saint-Etienne que ces règles de distanciation sociale sont respectées par les coureurs et marcheurs bien au-delà de plusieurs mètres de distance.
« Une vraie nécessité de bouger, y compris pendant le confinement »
Maître de conférence émérite et praticien hospitalier à la faculté de médecine et au CHU de Saint-Etienne, le docteur Jean-Claude Chatard estime que le confinement, bien que nécessaire, n’est pas sans danger. Pour lui, la pratique du sport est indispensable. Voici ce qu’il préconise dans un entretien au Progrès de la Loire le samedi 18 avril 2020.
Le confinement est-il le meilleur moyen de lutter contre le Covid-19 ?
« C’est effectivement le meilleur moyen de lutter contre la diffusion du Covid-19. Le confinement complète les mesures barrières comme le lavage des mains, le port du masque, la distance de protection. Mais il n’est pas sans inconvénient majeur. »
C’est-à-dire ?
« Il renforce les dépressions, les violences conjugales, les addictions à l’alcool, au tabac, aux drogues. Chez les enfants, il accentue la perte des repères et le laisser-aller scolaire. Chez les adultes, il augmente la rupture du lien social et les frustrations. Chez les personnes âgées, il induit le syndrome du glissement progressif. Il accélère la perte d’autonomie et les chutes. Pire, restreindre les activités en extérieur diminue l’exposition au rayonnement solaire et la vitamine D. Cette vitamine améliore la résistance aux infections respiratoires comme celle du Covid-19. Actuellement, les personnes les plus à risques sont les sujets âgés avec, comme facteurs de comorbidités, obésité, diabète, maladies respiratoires et cardiaques. La moitié de la population française est en surpoids et risque des complications graves. »
Que proposez-vous pour atténuer ces effets dévastateurs ?
« L’activité physique est le meilleur médicament pour lutter contre l’obésité, le diabète et les autres facteurs de risques du Covid-19. L’Organisation mondiale de la santé recommande 30 minutes d’exercice modéré par jour, mais 1 heure voire 1 h 30 d’exercice par jour, sont recommandées pour obtenir un effet santé optimal : 50 à 60 % de diabète en moins, retour de l’estime de soi, meilleure immunité face aux infections et 25 % de médicaments en moins pour le traitement des dépressions. Chez l’enfant, une activité physique supérieure à 1 heure est recommandée pour le développement normal de son appareil loco moteur. En confinement, l’aptitude physique chute en quelques semaines et il faudra des mois d’entraînement pour la retrouver. Chez les sujets âgés, elle ne sera jamais retrouvée. Il existe donc une vraie nécessité de bouger pour tous, y compris pendant la période de confinement. »
Faire du sport comme vous le recommandez n’est pas facilement applicable avec les mesures liées au confinement…
« Le propos de cette alerte est de proposer des mesures simples de reprise normale de l’activité physique tout en maintenant les mesures barrières. D’abord, autoriser la marche à pied en augmentant les distances de déplacement à 5 km du lieu d’habitation et leur durée totale à 2 heures par jour. Ensuite, autoriser le vélo, normal ou électrique. Autoriser chaque fois que cela est possible via les mairies l’accès aux espaces verts, parcs, forêts, lacs et à la mer, en autorisant donc la natation. Développer enfin le sport chez les enfants, adultes et sujets âgés, grâce à l’encadrement par des professionnels des clubs et associations avec l’aval des professionnels de santé et des mairies garantes de l’accueil et du respect des mesures barrières. »
Le maire de St-Étienne a pris des mesures strictes concernant la pratique sportive limitée de 9 à 21heures. Qu’en pensez-vous ?
« J’imagine sans peine que cette décision a été prise dans un esprit très positif pour protéger la santé des Stéphanois. Les gouttelettes de salive peuvent en effet transmettent la maladie. Si les distances de sécurité sont maintenues, cette contamination restera exceptionnelle. Le rôle des pouvoirs publics n’est-il pas au contraire d’encadrer une pratique sportive tout en maintenant les mesures barrières ?
Voici le plaidoyer pour l’activité physique d’un médecin référent sport à la Direction Régionale de la jeunesse, des sports et de la cohésion sociale, Alain Ferrero.
« Il convient en effet de cesser de considérer les APS exclusivement comme une activité récréative, de confort, ou dévolue au plaisir, conception qui peut mener à des décisions confinant (!) dans le contexte présent à une perte de chance. »
« Je rappellerai que c’est la proximité avec d’autres ou un contact avec ce qu’ils ont touché qui peut transmettre le virus, pas le fait d’être à l’extérieur, ni de courir plutôt que marcher. »
« Enfin, pour couper court à d’éventuels reproches relatifs à des risques d’encombrement des services médicaux ou d’urgences et autres moyens de secours, courir n’est pas une activité accidentogène, et je pense que la plupart de ceux qui s’y livrent actuellement n’initient pas cette pratique.
Je peux désormais développer mon plaidoyer, car il me faut rappeler la nécessité de maintenir une bonne condition physique, ne serait-ce que pour être en capacité d’affronter le virus au cas où on en soit atteint dans un avenir proche?; à l’image de la « préhabilitation », qu’on conseille désormais avant une séquence thérapeutique agressive programmée, comme une intervention importante ou encore une chimiothérapie, qui va mobiliser nos réserves physiologiques et particulièrement respiratoires, sur lesquelles il faut pouvoir compter, a fortiori tant qu’il n’existe pas de vaccin ni de traitement : il ne faudrait pas arriver face au Covid-19 totalement déconditionnés physiquement – ce qui survient très vite, selon l’adage « mieux vaut vieillir de trente ans que passer trois semaines au lit », alors que désormais un confinement très prolongé est envisagé – je pourrais ajouter mentalement.
Rappelons que les APS diminuent l’incidence de nombreuses maladies chroniques, et que, même si rien n’a été montré ni sans doute recherché s’agissant des maladies aiguës, et en particulier du Covid-19 – et pour cause –, on leur accorde généralement un effet très positif sur la stimulation de l’immunité. On peut aussi arguer, là encore de façon très générale mais cependant en ne perdant pas de vue que certains patients meurent d’une comorbidité, qu’il existe un lien direct entre volume d’activité physique pratiquée et diminution de la mortalité toutes causes, avec un plateau à partir d’un certain (élevé) niveau d’activité?; et qu’un lien extrêmement puissant est établi entre niveau de capacités physiques (au sens intensité de l’effort supporté) et durée de vie, sans guère de plateaux, si ce n’est les limites des capacités humaines.
Rappelons également le caractère indispensable des APS pour le maintien et le développement de la fonction respiratoire, ce qui est bien démontré en réadaptation. Citons vite les effets bénéfiques sur le plan psychologique, particulièrement intéressants avec le confinement. »
———-L’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (ANSES) a publié le 1er avril un avis relatif à l’évaluation des risques liés à la réduction du niveau d’activité physique et à l’augmentation du niveau de sédentarité en situation de confinement.
Une série de nouvelles recommandations incitant vivement à avoir une activité physique.
Que dit l’ANSES dans son avis ?
« La sédentarité est un facteur de risque de maladies chroniques et de mortalité accrue. Le contexte dudit confinement favorise ces comportements sédentaires et peut conduire à une augmentation du temps passé assis ou allongé (en dehors du sommeil), dont les effets peuvent être délétères sur la santé, y compris la santé mentale.
L’activité physique régulière est associée – selon les études – à une réduction de la mortalité précoce de 29 à 41 %. Une pratique quotidienne de 15 minutes pourrait ainsi diminuer le risque d’au moins 14 %.
Si l’inactivité physique et la sédentarité sont associées aux risques de surpoids, d’obésité et de complications cardiométaboliques, en contrepartie, l’activité physique régulière diminue ces mêmes risques et permet de prévenir la survenue de la plupart des maladies chroniques.
Les personnes passant plus de 7 heures par jour en position assise devant un écran de télévision ont un risque de mortalité cardiovasculaire de l’ordre de 85 % plus élevé que celles passant moins d’1 h par jour devant la télévision. Une situation d’autant plus probable que la durée journalière de sédentarité en situation de confinement est élevée.
Le maintien d’une AP pendant la durée du confinement contribuerait ainsi à limiter les conséquences associées à l’inactivité physique, et, dans le présent contexte à maintenir une habitude qui pourrait être poursuivie après la fin du confinement. Elle aidera également à mieux appréhender la sortie du confinement et la reprise des activités habituelles. »
D’autre part, l’Anses pointe un risque pour l’appareil locomoteur, en particulier “une amyotrophie et une fatigabilité musculaire”. “Le muscle va fondre”, traduit Anne Vuillemin.
Si cette situation est réversible sans difficulté pour les personnes jeunes, elle peut avoir “des conséquences majeures chez les personnes avançant en âge, majorant la perte d’autonomie et accroissant le risque de chute”, note l’Anses.
Les solutions.
L’Anses recommande de se lever toutes les 30 minutes au minimum, pour “marcher quelques mètres, faire des exercices de souplesse et de renforcement musculaire”.
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Donner un brin de pouvoir à un imbécile vous en faîtes un tyran “Napoléon”
Plus royaliste que le roi
Il doit être cousin avec Macron
Ce n’est pas normal qu’un seul homme investi d’un pouvoir décide seul c’est en antidémocratique
qu’elle honte
idem pour l’interdiction des marchés en plein air
notamment place ALBERT THOMAS
Bonjour,
Suite à l’intervention du Président de la République sur le sujet, allez-vous essayer de faire annuler cet arrêté anti-sportif pris par le maire de Saint Étienne?
Je sais que des acteurs de la société civile planchent dessus !
Bonjour,
Vous avez notre soutient pour ce point. Cette situation antisport n’est pas normale. Ce matin à Saint Galmier étaient ouverts en dehors des boulangeries, le tabac et le marchand de vin! Je les adore mais cette situation est ridicule. Du tabac, de l’alcool et pas de sport!
En plus les chemins de campagne sont maintenant interdit! La gendarmerie court après les personnes qui se baladent! Cette situation es ridicule.
Il est urgent d’imposer 2h de sortie à tout le monde avec une heure de sport ou d’activité plus intensive. pour que lors du dé-confienement, les gens soient capable de résister à des potentiels contacts avec le virus.
Mr Juanico on compte sur vous, cest une urgence sanitaire.
Dites nous comment agir pour vous soutenir.
Cordialement