Ce mercredi 20 janvier, nous avons auditionné Pascal Duchadeuil, président de la cinquième chambre de la Cour des comptes, sur le rapport d’enquête (voir ci-dessous) réalisé par la Cour sur les dispositifs et les crédits mobilisés en faveur des jeunes sortis sans qualification du système scolaire.
Notre pays dispose d’un atout formidable : sa jeunesse. Nous sommes le deuxième pays européen le plus jeune, après l’Irlande. Mais notre modèle a ses faiblesses. Le taux d’emploi des jeunes est aujourd’hui très bas, inférieur à la moyenne européenne. La reproduction sociale, la faible mobilité sociale et le fort taux d’échec scolaire des enfants issus de milieux modestes sont des réalités.
La question du décrochage est cruciale et devrait constituer la priorité des pouvoirs publics. Il faut mettre le paquet ! Les chiffres sont clairs : trois ans après la fin de la scolarité, 50 % des jeunes non diplômés sont au chômage, quand ce taux n’est que de 10 % pour les diplômés de l’enseignement supérieur. Ces jeunes au chômage représentent un véritable gâchis économique et social : la réparation sociale de ces échecs représente un coût qui n’est pas soutenable pour nos finances publiques. Il faut donc s’attaquer au problème fortement et précocement.
Le travail de la Cour des comptes est d’une grande qualité ; les constats qu’elle fait sont très proches de ceux qu’établissait le rapport sur la mobilité sociale des jeunes que Jean-Frédéric Poisson et moi-même avions réalisé dans le cadre du comité d’évaluation et de contrôle. Mais la Cour a approfondi le sujet, notamment en se rendant dans de nombreuses régions ; son rapport tire les leçons de nombreux retours d’expérience. Il dessine, en analysant les bonnes pratiques, ce que pourrait être une politique plus cohérente.
La Cour regrette, comme nous, la multiplicité des acteurs – Europe, État, collectivités territoriales, missions locales, Pôle emploi, partenaires sociaux… –, l’éparpillement des financements, l’empilement des dispositifs. Cette dispersion, cette complexité des dispositifs les rendent incompréhensibles pour ceux qui sont chargés de les mettre en œuvre, et surtout pour les publics visés, c’est-à-dire des jeunes sortis du système scolaire sans qualification.
Le schéma que citait M. Duchadeuil, qui se trouve page 31 du rapport, est en effet très simplifié. Dans notre rapport, Jean-Frédéric Poisson et moi-même avions compté que, depuis 1977, quatre-vingts dispositifs de la politique de l’emploi ont visé les jeunes ! Chaque année, il y a de nouvelles annonces. Et personne n’y comprend rien.
Ma première question portera sur la multiplicité des dispositifs et sur leur évaluation. Aujourd’hui, il n’y a pas de politique unifiée à destination des jeunes peu ou pas qualifiés : préconisez-vous un système unique, comme nous l’avions fait en proposant un « contrat de réussite », aide unique à l’insertion professionnelle, qui pourrait être personnalisée en fonction du parcours du jeune ? Faut-il généraliser la garantie jeunes, dont les premiers retours semblent montrer qu’elle donne de bons résultats sur le terrain, notamment par rapport au CIVIS en effet un peu émoussé ?
Nous rencontrons d’autre part un problème de gouvernance. Comment mieux coordonner les différents acteurs à l’échelle d’un bassin de vie, d’emploi?? Vous citez notamment les comités de coordination territoriaux de l’emploi et de la formation professionnelle (CCTEF). Quel est l’échelon le plus pertinent ?
Vos chiffres montrant le coût des dispositifs sont très intéressants. Il faut bien sûr distinguer coût moyen et coût à la place, car les différences peuvent être significatives : dans le cas de l’EPIDe, le coût moyen – qui est d’environ 24?000 euros – est très supérieur au coût à la place, en raison du grand nombre de jeunes qui quittent cet établissement en cours de route. On constate néanmoins, à la lecture du rapport, que les dispositifs les plus onéreux sont globalement les plus efficaces, sans doute parce qu’ils assurent un meilleur accompagnement. N’est-ce pas une leçon pour les politiques publiques?? Ne devrions-nous pas nous débarrasser de certains dispositifs, sans doute peu coûteux mais peu efficaces, pour concentrer tous les moyens sur ceux qui sont plus chers, mais qui ont fait leurs preuves??
S’agissant du décrochage, vous montrez très bien les failles du système, puisque les plateformes de suivi ne détectent par exemple que la moitié des décrochages – on sait pourtant à quel point la rapidité d’intervention est importante. Vous évoquez les solutions de raccrochage scolaire, par exemple les micro-lycées. Voyez-vous aujourd’hui d’autres moyens de diversifier l’offre scolaire, afin de ramener les jeunes dans le système ? Il y a des places vacantes dans l’éducation nationale : dans notre rapport, nous citions les chiffres de 40 000 places vacantes dans les lycées professionnels, et de 48 000 places vacantes dans les internats de l’éducation nationale. Vous avez peu évoqué la voie professionnelle, la plus touchée par le décrochage – 42 % des jeunes décrocheurs sont issus d’un cursus qui devait les mener à un CAP ou à un BEP. Que proposez-vous sur ce sujet?
Enfin, comment mieux éviter les disparités territoriales?
Les dispositifs et les crédits mobilisés en faveur des jeunes sans qualification
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