J’ai été interpellé par de nombreux Ligériens concernant certaines dispositions contenues dans le projet de loi pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques, dit « loi Macron ». En particulier, une pétition, largement relayée, dénonçant les conséquences de l’extension du travail dominical dans le secteur du commerce m’a été adressée. Dans un courrier (voir-ci-dessous), j’ai répondu à chaque pétitionnaire quant à ma position sur cette loi et sur la mesure emblématique du passage à douze « dimanches du maire » par an (les dimanches où le maire peut accorder des autorisations d’ouverture, au lieu de cinq actuellement).
En amont de la date prévue pour le vote, je m’étais exprimé publiquement pour annoncer que je ne voterai pas le projet de loi en l’état lors de la première lecture à l’Assemblée nationale.
Concernant le travail du dimanche plus particulièrement, je considère en effet que l’ampleur du changement fera basculer les ouvertures dominicales d’un régime « exceptionnel »
(autorisations généralement accordées lors des fêtes et des soldes) à un régime bien plus banalisé : travail dominical un dimanche par mois.
De plus, dans les zones touristiques internationales nouvellement créées, les salariés pourront travailler le dimanche et « en soirée » puisque le début de la période de nuit est repoussée à minuit. Cette nouvelle disposition est ainsi introduite et ouvre une brèche, en poussant à la banalisation du travail après 21 heures. Auparavant, le travail de nuit ne pouvait se justifier que pour certaines activités particulières ; désormais, avant minuit, un tel travail pourra être possible pour l’ensemble du commerce de détail, dans toute une zone.
L’argument principal du Gouvernement sur cette question est fondé sur le volontariat qui a été introduit in extremis pour les « dimanches du maire » par amendement. Néanmoins, même théoriquement garanti, le volontariat restera problématique dans la mesure où les salariés du commerce – et bien souvent les salariées – se trouvent dans des situations précaires. Rappelons que 64 % des salariés dans le secteur du commerce de détail sont des femmes, que 28 % des salariés dans ce secteur sont à temps partiel (40 % pour les salariées), dont 36 % en temps partiel subi (44 % pour les femmes), et que le salaire horaire brut moyen n’excède pas 10 % du SMIC chez ces salariées (30 % chez les hommes). Les salariés du commerce de détail seront donc peu à même d’être armés dans une négociation. Surtout, prouver qu’un employeur aura licencié un employé, ou qu’il aura refusé une embauche, parce que le candidat aura exprimé son refus de travailler le dimanche, sera extrêmement compliqué en l’absence de preuves écrites. De nombreux abus risqueront ainsi de ne pouvoir être sanctionnés.
Enfin, si le régime des contreparties dans les zones (commerciales, touristiques, touristiques internationales, gares) sera bien unifié, le législateur a renoncé à fixer des compensations minimales par la loi. Pourtant, dans les précédents PUCE (périmètres d’usage de consommation exceptionnel), le doublement du salaire était un plancher en cas de décision unilatérale de l’employeur (et donc, de fait, un plancher dans les négociations salariales). Le Gouvernement promeut une philosophie du « dialogue social » dont on sait néanmoins les difficultés, surtout à l’heure actuelle, notamment du fait des exigences patronales. Ce point a été reconnu par le Ministre lui-même à la fin de l’année concernant le pacte de responsabilité. Dès lors, notamment dans les PUCE existants, les salariés actuellement payés doubles, risqueront d’être contraints de fait à signer des accords leur accordant des garanties moindres pour ne pas perdre trop d’argent à la fin du mois.
Le vote d’abstention m’est apparu comme le bon signal à envoyer à notre gouvernement pour lui demander de renoncer à ce type de mesures de déréglementation et de dérégulation et de mettre en place une autre orientation économique, plus conforme à nos engagements de campagne.
Finalement, le Gouvernement a choisi d’engager sa responsabilité sur ce texte, comme le lui permet, l’article 49.3 de la Constitution. Je n’ai donc pas eu à me prononcer en première lecture. Néanmoins, le Gouvernement va devoir maintenant en tirer toutes les conclusions et rouvrir des discussions avec l’ensemble de la majorité, à laquelle j’appartiens, pour la suite du processus parlementaire.
Ma réponse à la pétition pour le repos dominical
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