Nous avons adressé un courrier au Président de la République pour nous opposer à la candidature du général émirati Ahmed al-Raisi, accusé de torture, à la présidence d’Interpol.
En février dernier nous avions interpellé, avec soixante parlementaires, le Président de la République pour qu’il se mobilise en faveur du militant émirien des droits humains Ahmed Mansour.
Cet intellectuel laïque et libéral, lauréat du prix Ennals considéré comme le Nobel des droits de l’homme, est enfermé dans la plus grande impunité dans une prison d’Abou Dhabi depuis plus de 4 ans.
De nombreuses ONG ainsi que le Parlement européen se sont mobilisés ces dernières années pour demander sa libération immédiate.
Avec 35 collègues, nous venons d’adresser à Emmanuel Macron un nouveau courrier afin que notre pays s’oppose et propose une alternative à la candidature du responsable du calvaire d’Ahmed Mansour à la tête de l’institution Interpol basée à Lyon : M. Ahmed Nasser Al Raisi, candidat des Émirats arabes unis, l’un des plus hauts responsables de la hiérarchie sécuritaire de la monarchie est aujourd’hui considéré comme le favori à la présidence de cette institution dont les Emirats sont le deuxième contributeur.
Dans un contexte de défiance vis-à-vis des institutions phare de la gouvernance mondiale qui fragilise la démocratie, il serait en effet notoirement malvenu que cet homme contre qui planent de très lourdes accusations prenne la direction d’une organisation internationale dont la mission est de défendre l’Etat de droit et le respect des libertés fondamentales.
L’avocat William Bourdon, mandaté par l’ONG Gulf Center for Human Watch, vient de déposer une plainte auprès des juridictions parisiennes contre le général Al Raisi pour des accusations de torture infligées à Ahmed Mansour.
Retrouvez en cliquant sur ce lien l’article de Médiapart :
Retrouvez ci-dessous notre courrier au président de la République :
Monsieur le président de la République,
Au mois de février dernier, nous vous avions interpellé sur les conditions dramatiques dans lesquelles M. Ahmed Mansour, infatigable militant des libertés, était emprisonné pour le seul motif d’avoir exercé ses droits fondamentaux d’opinion et d’expression.
À l’époque, l’ONG Human Rights Watch venait de publier un rapport alarmant sur la persécution de cet intellectuel laïque et libéral, lauréat en 2015 du prestigieux Prix Martin ENNALS considéré comme le Nobel des droits de l’homme. Embastillé depuis mars 2017 dans une prison d’Abou Dhabi, il est le symbole de la lutte pour la défense des libertés publiques dans son pays et plus largement dans le monde arabe.
Après plusieurs grèves de la faim, son état physique et mental s’est gravement détérioré. Dans un contexte sanitaire où la crise de la Covid 19 a accentué son isolement, sa situation est désormais jugée très préoccupante.
Le calvaire de celui qui est considéré comme le prisonnier d’opinion le plus célèbre des Émirats arabes unis suscite désormais une vague d’indignation mondiale.
Dès octobre 2018, le Parlement européen avait exigé sa libération immédiate. Il y a quelques mois, nous étions 57 parlementaires de toutes tendances politiques confondues à vous écrire pour que vous puissiez, dans le sillage de vos engagements en faveur de l’opposant Alexeï Navalny en Russie ou de la féministe Loujayne al- Hathloul en Arabie Saoudite, plaider son cas auprès de votre homologue émirien.
Ces dernières semaines, plusieurs ONG ont une nouvelle fois tiré la sonnette d’alarme pour que ses souffrances ne soient plus reléguées aux oubliettes. Malgré toutes ces mobilisations, sa situation semble figée, le régime d’Abou Dhabi s’enfermant dans une spirale autoritaire que peine à cacher un marketing publicitaire trompeur.
C’est fort de ce triste constat que nous souhaitons attirer votre attention sur la probabilité de voir l’une des plus grandes institutions internationales tomber sous l’influence d’un homme dont le lourd passif devrait l’éloigner d’une telle responsabilité.
En effet l’agence Interpol, qui a son siège en France et dont le rôle, plus que jamais essentiel, est de coordonner les efforts des polices du globe pour garantir un monde plus sûr, est en passe d’élire le candidat Ahmed Nasser Al-Raisi à sa tête.
Or, ce dignitaire qui fait partie de la haute hiérarchie sécuritaire des Emirats arabes unis n’est pas étranger aux supplices que subissent les militants épris de justice et de liberté sur le sol émirien.
En tant qu’Inspecteur général du ministère de l’Intérieur dont il occupe le poste depuis 2015, il est en effet directement responsable des agissements des services de police qui sévissent dans son pays dans la plus grande impunité.
À ce titre, plusieurs rapports internationaux accréditent l’idée selon laquelle son rôle a été central dans la détention arbitraire et les abus subis par nombre de militants des droits humains.
C’est d’ailleurs sur la base de ce statut et de sa place éminente dans les rouages de l’arsenal répressif de l’Etat émirien qu’une plainte a été déposée contre lui auprès des juridictions parisiennes compétentes.
Sur le principe de la compétence universelle, ce recours devant les tribunaux vise à traduire en justice un homme pour le crime de torture infligé à Ahmed Mansour dont le cauchemar dure depuis plus de cinq ans.
Parlementaires, nous estimons qu’Interpol, dont la vocation est de contribuer à garantir les droits expressément stipulés dans la Déclaration universelle des droits de l’Homme, ne devrait pas être dirigée par un major-général sur lequel planent de telles accusations.
Dans un contexte général de défiance des institutions mondiales, cette prestigieuse institution doit être dirigée par des responsables dont la probité ne souffre d’aucune critique.
C’est pourquoi, M. le président de la République, nous comptons sur vous pour que la France s’oppose à la candidature du général Ahmed Nasser Al Raisi et participe de la recherche d’une alternative sérieuse prompte à donner à Interpol la capacité de poursuivre son action à travers le monde.
Nous vous prions de croire, M. le président de la République, en l’assurance de nos sentiments les plus respectueux.
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Il est complètement incroyable que puisse être même proposé un personnage de ce type à Interpol !
Janine