Mercredi 8 janvier, en séance publique, j’ai interpellé la Ministre du Travail, Muriel Pénicaud, sur la situation très dégradée de l’emploi des séniors qui sont aujourd’hui plus exclus du marché du travail (chômage, précarité et pauvreté). Une question qui n’est pas sans lien avec celle des retraites !
Le détail de mon intervention :
Ma question, qui porte sur l’emploi des seniors, n’est pas sans lien avec celle des retraites.
Dans notre pays, le taux d’emploi des 60-64 ans est faible : un peu plus de 33 % en 2018 contre 77 % pour les 50-59 ans. Dans son référé sur les fins de carrière des salariés, rendu public en octobre 2019, la Cour des comptes s’inquiète du risque de précarité pour les seniors, qui sont les plus exclus du marché du travail, provoquant un coût croissant pour la solidarité en allocations et minima sociaux.
Aujourd’hui, plus de 900 000 personnes âgées de plus de 50 ans sont inscrites à Pôle emploi en catégorie A, un chiffre qui a plus que doublé en dix ans. Si on ajoute les personnes des catégories B et C en activité réduite, on dénombre plus d’un million de seniors à Pôle emploi. Il y a aujourd’hui plus de seniors au chômage : dans leur cas, les ruptures conventionnelles sont souvent une manière déguisée et sauvage de les mettre en préretraite.
Il y a aussi plus de seniors en chômage de longue durée : la direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques, la DARES, indique que les seniors sont proportionnellement bien plus souvent dans cette situation que le reste de la population : 63 % des plus de 55 ans sont au chômage depuis plus d’un an, alors que ce taux n’est que de 42 % pour l’ensemble des chômeurs.
Il y a plus de précarité chez les seniors, qui sont proportionnellement ceux occupant le plus souvent des emplois à temps partiel : près d’un quart des plus de 55 ans occupent ainsi un emploi à temps partiel, contre seulement 18,5 % des travailleurs.
Enfin, il y a également plus de pauvreté chez les seniors. Selon la dernière présentation du Conseil d’orientation des retraites, le taux de pauvreté des 50 à 69 ans qui sont au chômage est de 41 %, contre seulement 5 % pour les autres retraités.
Ainsi, ma question est simple : que comptez-vous faire concrètement pour remédier à cette situation dégradée et pour maintenir les seniors en emploi ? Quelles mesures prendrez-vous pour prévenir l’usure professionnelle et la pénibilité au travail ? Pouvez-vous également nous dire, madame la ministre, combien de salariés ont bénéficié du compte professionnel de prévention, le « compte pénibilité », en 2018, après que vous avez modifié les critères de pénibilité ?
La réponse de la Ministre :
Le sujet que vous mentionnez a été évoqué hier avec les partenaires sociaux au ministère du travail, lors du lancement de la concertation sur la pénibilité et l’emploi des seniors.
Environ deux tiers des 55 à 59 ans sont en activité. C’est la moyenne européenne et compte tenu des incapacités ou conditions d’emploi particulières de certains, ce taux peut être considéré comme relativement important. Mais vous avez raison : il en est tout autrement pour les 60-64 ans, dont le taux d’activité n’est que d’un tiers.
De même, il est exact que le taux de chômage de longue durée est très élevé chez les seniors. S’il existe moins de risques de se retrouver chômeur à ce stade de sa carrière, il est en revanche extrêmement difficile d’en sortir si cela arrive. Il s’agit donc d’un véritable défi, que nous devons intégrer dans notre réflexion sur l’emploi des seniors, qu’il s’agisse de la politique de l’emploi ou de la réforme des retraites.
Plusieurs actions sont déjà menées. Dans le cadre du PIC, 24 % des demandes de formation concernent des seniors demandeurs d’emploi. Parmi les personnes embauchées par un groupement d’employeurs, beaucoup sont des seniors. Le parcours emploi compétences, sorte de contrat aidé amélioré, assorti de formations et d’un accompagnement, est suivi par 34 % de seniors, qui sont également très présents dans les dispositifs d’insertion par l’activité économique.
C’est une question très importante, car elle a des conséquences sur le niveau de pauvreté : en effet, les seniors sont souvent à temps partiel ou exercent des emplois précaires, et peuvent donc se retrouver en situation de pauvreté. C’est pourquoi nous avons ouvert hier la concertation avec les partenaires sociaux sur ce sujet. Nous nous verrons tout au long de la semaine et reparlerons mardi prochain de ce sujet prioritaire.
Au-delà des actions de droit commun, qui permettent à plus de seniors d’être accueillis, nous devons aller plus loin, vers une évolution structurelle. Il faut également changer le comportement des entreprises, qui restent encore trop dans l’éviction. Notre société doit reconnaître la valeur de l’expérience : on ne peut pas à la fois exclure les jeunes au prétexte qu’ils n’auraient pas assez d’expérience et les seniors car ils en auraient trop ! Les personnes expérimentées ont beaucoup à apporter à la société et aux entreprises : ce sera l’objet de la concertation.
Muriel Pénicaud confirme que le taux d’activité des 60/64 ans n’est que d’un tiers. Lire la suite
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Enfin !