L’Assemblée Nationale examinait le 24 mars une proposition de loi visant à encadrer l’activité des agents sportifs. Je suis intervenu dans le cadre de la discussion générale.
Malgré quelques avancées, avec mes collègues du Groupe Socialiste nous avons voté contre ce texte qui ne résoudra pas les pratiques douteuses liées aux transferts dans les clubs comme les rétro-commissions et introduit une nouvelle niche fiscale pour les joueurs professionnels. Bref, encore de nouveaux cadeaux pour le foot-business !
Voici les six raisons pour lesquelles nous avons voté contre :
– La première, c’est que le sport business en général et le foot-business en particulier demeurent dans ce pays une zone de non-droit. La proposition de loi légalise le double mandatement, sous prétexte que la loi actuelle n’est pas appliquée et que les joueurs ne paient pas toujours leur agent. Or tout le monde sait que c’est par ce biais que se pratiquent toutes les rétro-commissions, toutes les transactions frauduleuses.
– La deuxième raison, c’est que nous n’avons pas pu traiter le sujet des transferts, pourtant central. C’est pendant le « mercato » que les contrats les plus juteux sont passés, dans l’opacité la plus complète. Le gouvernement a refusé de faciliter la transparence par la centralisation des flux financiers effectués à l’occasion des transferts.
– La troisième raison de voter contre cette proposition de loi, c’est le cadeau fait aux joueurs en compensation de la suppression du Droit à l’Image Collective. Ce texte a été remis dans les tuyaux peu de temps après la suppression du DIC. C’est une « coïncidence heureuse ». Au total, les joueurs auront un revenu supplémentaire net d’impôt. C’est un véritable cadeau fiscal et social qui vient de leur être fait. Dans la situation sociale de notre pays, nous n’avions pas besoin de montrer une nouvelle fois combien l’argent est roi.
– En quatrième lieu, le texte confie le contrôle des agents non pas seulement aux fédérations mais aussi aux ligues professionnelles. Quel magnifique conflit d’intérêts ! Les ligues sont l’émanation des clubs professionnels. Le procès du PSG l’illustre parfaitement. Comment voulez-vous que les ligues professionnelles sanctionnent les clubs, qui eux-mêmes viennent de retrouver grâce à cette proposition de loi la possibilité de payer les agents ?
– La cinquième raison de voter contre, c’est l’amendement que le gouvernement pour restreindre le champ des condamnations pénales interdisant l’exercice de la profession d’agent, un amendement curieusement laxiste, visant à supprimer la liste exhaustive des condamnations pénales rendant impossible l’obtention ou la détention de la licence d’agent sportif, en la remplaçant par une formulation bien évasive, évoquant les condamnations pénales pour « agissements contraires à l’honneur, à la probité ou aux bonnes moeurs ».
– Enfin, le sujet des mineurs n’est que partiellement traité. Les mineurs dont il est fait état dans le texte sont ceux qu’un intermédiaire viendrait solliciter. Or nous n’avons cessé de répéter qu’aujourd’hui, dans les clubs, les mineurs ne sont pas sollicités par des agents, mais par des salariés de clubs qui viennent regarder les matchs, et qui n’ont absolument pas de carte d’agent.
Voici le texte de mon intervention :
Chers collègues, j’aimerais expliquer pourquoi le groupe socialiste, radical, citoyen votera la motion de rejet préalable qui vient d’être défendue par notre collègue Gaëtan Gorce. Comme il l’a bien résumé, nous éprouvons un sentiment de malaise par rapport au calendrier et au contexte dans lequel s’inscrit la discussion de ce projet de loi en deuxième lecture. Nous avons vraiment l’impression de légiférer sous la pression des intérêts particuliers et privés de vos amis.
Ce n’est pas la première fois, du reste. Encore la semaine dernière, ici même, un autre texte, soutenu par le Gouvernement, visant à encadrer la profession d’agent sportif s’est traduit par l’octroi de nouveaux cadeaux au foot business et plus généralement au sport business : le double mandatement pour les clubs professionnels, de nouvelles niches fiscales pour les joueurs professionnels qui pourront être rémunérés tout en échappant à l’impôt. Nous avons le sentiment d’être sous la pression permanente de quelques intérêts particuliers, ceux de M. Aulas et de ses amis, qui voudraient nous dicter notre conduite dans l’hémicycle et légiférer à notre place. Mais cela ne se passe comme ça !
La critique principale que nous pouvons adresser à ce texte, c’est que la prise en compte des intérêts particuliers prend le pas sur la préoccupation pour l’intérêt général, c’est-à-dire la santé publique, le financement du sport et le financement de la filière hippique.
Monsieur le ministre, vous nous indiquiez que votre ambition à travers ce texte était de fixer les règles. Or, à cet égard, on doit déplorer plusieurs insuffisances. Tout d’abord, aucune sanction n’est prévue à l’encontre de ceux qui, en toute impunité, se sont mis dans l’illégalité depuis maintenant de nombreux mois. Insuffisances ensuite s’agissant des dispositions relatives aux conflits d’intérêts : on pourra être à la fois opérateur en ligne, actionnaire dans les grands groupes de médias et organisateurs d’événements sportifs. Insuffisances, enfin, s’agissant de la nécessaire prise en compte de la coopération européenne.
Pour toutes ces raisons, nous appelons à voter la motion de rejet préalable.ri
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