Comme nous avons été nombreux à gauche à le souligner, ce texte est inapplicable dans de nombreuses communes, en particulier les plus petites, car elle ne tient pas compte de la réalité et de la diversité des situations. C’est un texte d’affichage destiné à flatter l’opinion publique mais qui n’a pas été conçu pour être efficace dans les faits tellement il est contraignant.
Les Maires doivent organiser ce service d’accueil en moins de 48 heures sans moyens humains supplémentaires. Les villes doivent transmettre “une liste de personnes susceptibles d’assurer le service d’accueil”, souvent au-delà de l’effectif municipal, y compris des personnes qui ne sont pas spécifiquement formées aux métiers éducatifs : aucun taux d’encadrement n’est fixé, ni aucune compétence particulière n’est requise pour les personnes susceptibles d’assurer cet accueil.
A la veille d’une journée de grève dans l’Education Nationale, nous constatons, comme nous nous y attendions, que dans la Loire une grande majorité de communes sont dans l’incapacité totale de mettre en oeuvre ce dispositif de droit d’accueil improvisé par le gouvernement. Ce type d’annonce démagogique non suivi d’effets provoquera une déception légitime chez des parents d’élèves qui auront cru à la mise en place effective de ce droit d’accueil.
Vous trouverez ci-dessous l’intervention que j’avais faite dans l’hémicycle de l’Assemblée Nationale le 15 juillet dernier lors de l’examen du texte de loi sur le droit d’accueil dans les écoles maternelles et élémentaires.
“Commençons par une question simple : pourquoi sommes-nous là ? Pourquoi devons-nous examiner ce texte de loi en plein mois de juillet ?
Parce que le Président de la République l’a voulu. Le 15 mai, à l’issue d’une manifestation contre les suppressions de postes dans l’éducation nationale et d’une grève suivie par 65 % des enseignant du premier degré, Nicolas Sarkozy a fait un coup supplémentaire et a décidé qu’un texte sur le service d’accueil dans les écoles maternelles et élémentaires serait voté avant l’été, sans concertation avec les organisations syndicales ni avec les élus, qui ont vécu cette décision comme une véritable provocation. Ce comportement étant devenu comme la marque de fabrique du Gouvernement, nous ne sommes pas étonnés sur la forme mais plutôt sur le fond, puisque le Président a aussi déclaré, dans ce lieu de défoulement qu’est apparemment devenu le conseil national de l’UMP, que désormais, lorsqu’il y a une grève dans ce pays, personne ne s’en aperçoit. Pourquoi donc légiférer sur l’accueil des enfants les jours de grève ? Il ne s’agit en fait que d’un énième texte d’affichage, destiné à assouvir les fantasmes de la frange la plus conservatrice de l’électorat UMP.
En effet, pourquoi légiférer alors que l’expérimentation de cette mesure est un échec cuisant et que ce texte sera inapplicable dans de nombreuses communes, en particulier les plus petites ? Mais ce droit d’accueil posera également d’importants problèmes dans les grandes villes, Saint-Étienne par exemple, puisque les réformes simultanées que vous avez engagées vont désorganiser toute l’école primaire. Diminution des heures de cours, nouveaux programmes ? Après le travailler plus pour gagner moins pour les salariés, vous inventez pour les élèves l’apprendre plus en travaillant moins. Un soutien de deux heures par petits groupes est mis en place, mais la répartition de ces heures est laissée à l’appréciation de chaque école. Tous ces changements mettent en jeu les horaires de cantine, d’étude, de nettoyage des locaux, de transports scolaires, et donc in fine le personnel municipal, mais les collectivités locales n’ont pas été associées à la réflexion. Il s’agit pourtant de l’organisation du temps de l’école, des enfants, des familles et de la société. Bref, c’est le grand bazar à l’école primaire. Vous êtes, Monsieur Darcos, le ministre de la pagaille scolaire !
Pourquoi légiférer, encore, alors qu’il y a en moyenne 0,3 jour de grève par an et par enseignant dans le primaire depuis les années 2000 ? Nous avons entendu des propos extravagants tout à l’heure. MM. Lellouche ou Lefebvre ont parlé de “prise d’otage”. Je suis parent d’élève, et je sais d’expérience que les enseignants prennent le soin de prévenir les parents, souvent une semaine à l’avance. Il y a en moyenne 37 % d’enseignants grévistes lors des mouvements sociaux : je sais aussi que les enseignants non-grévistes accueillent les élèves à l’école. Dans la réalité, c’est ainsi que cela se passe !
Ce texte est un signe supplémentaire du désengagement de l’État de ses missions de service public, et en particulier de son devoir de remplacer les enseignants absents par d’autres enseignants. Le droit d’accueil est en fait le cache-sexe de vos carences, de votre incapacité à assurer le droit à l’éducation !”
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